2016/09/03

Le phenomenon de l'illumination


Silo. Canarie 2 – 1978 
 
4° Jour.
A mesure que l’on descend dans l’espace de représentation, cet espace s’obscurcit. A mesure que l’on monte dans cet espace il s’éclaircit. Comme vous le savez bien. Cette obscurité dans la descente et cette clarté dans la monté sont en rapport avec deux phénomènes : un l’éloignement des centres optiques et le système habituel d’idéation et l’autre le système habituel de perception par lequel nous avons associé la lumière du soleil avec le ciel, etc… l’absence de lumière avec les profondeurs.
Ceci ne signifie pas que les objets, placés dans les hauteurs ou les profondeurs ne soient pas clairs, car il y a des objets dans les hauteurs qui sont obscurs même lorsque l’espace de représentation est plus illuminé, et il y a des objets qui sont clairs dans les profondeurs de l’espace de représentation. Mais il y a des points limites, aussi bien dans la montée que dans la descente, dans l’espace de représentation, et ainsi en arrivant aux limites, tant en bas qu’en haut, tout l’espace se trouve obscurci. Il se trouve obscurci parce que nous arrivons aux sensations limites du corps. Il est obscur parce qu’au-delà il n’y a pas de signal. De sorte qu’en descendant ou en montant, même lorsqu’en haut nous voyons de la clarté, si l’on monte bien au-delà, au-delà de la clarté, l’espace de représentation s’obscurcit aussi. Enfin l’espace de représentation, aussi bien en bas qu’en haut, dans ses limites, se trouve totalement obscur.
Dans les profondeurs ou dans les hauteurs peuvent apparaître des objets plus ou moins lumineux. Je peux représenter ces objets, mais cela ne modifie pas le ton général de lumière qui peut exister dans l’espace de représentation. Cependant dans certaines conditions et toujours aux limites de l’espace de représentation, uniquement dans des conditions déterminées, un curieux phénomène de lumière se produit, il fait irruption en illuminant tout l’espace de représentation. Ainsi cette lumière qui illumine tout l’espace de représentation s’impose de telle façon que même si notre sujet monte ou descend, dans tous les cas l’espace de représentation demeure illuminé. Cette lumière ne dépend pas d’un objet spécialement illuminé, mais tout l’écran est maintenant très brillant. C’est comme si vous mettiez la T.V., complètement lumineuse. Il ne s’agit pas de voir un objet plus illuminé qu’un autre, mais il y a une brillance particulière qui n’est pas en fonction de ce qui se passe dans les figures, la brillance générale sur tout l’écran est extrême. Dans certains processus transférentiels, après avoir enregistré ce phénomène, notre ami ressort en veille, et sa perception du monde continue à être modifiée par cette curieuse transformation qui s’est opérée dans son espace de représentation. Selon les descriptions, les objets lui semble plus brillants, plus nets, avec plus de profondeur, etc.… C’est-à-dire qu’en produisant ce curieux phénomène d’illumination de l’espace de représentation, quelque chose aussi s’est produit non seulement dans le système de représentation mais aussi ce système de représentation à modifié les perceptions du monde, selon ce que nous venons de voir. IL est très accidentel que les deux phénomènes se produisent : l’obscurité de la limite, le dépassement de cette barrière, fréquemment décrite et l’accès à une sorte de lumière illuminant l’espace de représentation.
Par contre dans les processus autotransférentiels, l’intention finale de ce processus, est de transcender les limites de la représentation de cet espace qui finalement s’obscurcit. De même, empiriquement, sans grande connaissance technique, ou peut-être avec une connaissance mais sans l’afficher, dans de nombreuse religions et pratique mystiques, il s’agit de se mettre en contact avec cette lumière ou avec ce phénomène transcendant le système de représentation, qui soudain fait irruption dans la conscience.
Avec différents procédés ascétiques, parfois rituels, parfois hallucinatoire, au moyen du jeûne, de la prière, de la répétition, par de nombreux moyens, beaucoup de rites dans tous les cas supérieurs et beaucoup de religions prétendent obtenir ce contact avec une sorte de source de lumière. Dans les processus transférentiels et autotransférentiels, que ce soit par accident dans le premier cas ou de façon dirigée dans le deuxième, on a quelque connaissance de ce phénomène, et on sait que ceci peut se produire quand le sujet a reçu une forte commotion psychique, c’est-à-dire que son état est proche d’un état altéré de conscience. La littérature universelle est également remplie de considérations sur ces phénomènes. Lorsqu’après sa commotion spirituelle, ou interne, Moïse va sur la montagne et rencontre la lumière, un buisson ardent devant lui, et qu’il se prosterne devant ce buisson ardent et que sans le regarder il dit : «  Et toi qui es-tu ? », le buisson ardent, chose étrange, lui parle, c’est-à-dire communique avec lui et lui répond : «  je suis celui qui est ». C’est une réponse intéressante. Lorsque Paul qui à l’apparition du christianisme s’adonnait à la persécution des chrétiens, c’était un hobby pour lui, (rires), lorsque Paul poursuivait les chrétiens mais certainement sous une forte commotion spirituelle et une puissante recherche, vit soudain une grande lumière qui le fit tomber de son cheval, qui le rendit quasi aveugle, et la lumière lui demande : « Saül pourquoi, me poursuis-tu ? » C’est ainsi que Paul s’appelait : Saül. Il aurait pu s’appeler Ramon, par exemple (rire), mais il s’appelait ainsi. « Saül, pourquoi me poursuis-tu ? » De plus Saül resta aveugle, il fut aveuglé à cause de cette lumière. Et Saül se convertit au christianisme et devint le plus grand organisateur du christianisme, saint Paul.
Aujourd’hui, sans aller si loin, on aperçoit de nombreux objets dans les cieux. Les gens voient des lumières. Si notre ami est un monsieur qui conduit une voiture, et qu’en pleine nuit, il voit devant lui une lumière, une lumière qui se déplace, il arrête sa voiture. Cette lumière continue à se déplacer très vite et que ce n’est pas la lumière d’un autre véhicule, c’est une lumière qui se déplace dans toutes les directions, s’il n’y a pas de référence spatiale- des cabines téléphonique, des maisons etc…- à quelle distance se trouve cette lumière ? Est-elle derrière le pare-brise ? Ou devant ? Ou dans sa conscience ? Et cette représentation est en train de modifier sa perception. Puis, il y a beaucoup d’autres phénomènes qui n’ont rien à voir avec la lumière que nous évoquions dans le cas de Saül ou de Moïse, etc…
On observe bien d’autres cas : des cas de luminescence, etc… dans la chambre du silence etc… avec des drogues hallucinogènes, les gens observent aussi certaines choses mais sans rapport avec la lumière qui aveugle. Dans la chambre du silence, le sujet qui flotte, et son visage hors de l’eau et certaines parties de son corps aussi, à un moment donné le sujet voit une lune d’argent par exemple. Cette lune d’argent n’est rien d’autre que la traduction à l’image visuelle de ses sensations tactiles de cette partie du visage restée hors de l’eau, la forme de cette lune croissante ou décroissante, n’est autre que la forme du visage de notre ami. Cette lumière, à son tour devient plus indépendante et le sujet, comme il n’a plus de limites corporelles, ne sait pas si cette lumière est hors de lui ou bien, si elle est une projection d’un phénomène traduit de représentations internes. Ainsi donc ces lumières que l’on voit, peuvent être dues aussi, à des anesthésies intracorporelles qui, en raison de forts systèmes de tensions dans la société contemporaine, inhibent des impulsions et se traduisent alors en images déterminées qui peuvent se projeter dans un état altéré de conscience.
Cela se complique lorsqu’il s’agit d’un petit disque qui va et vient, mais que soudain ce phénomène fait irruption avec une grande force, il fait irruption avec une grande Force illuminant d’une grande lumière le sujet qui observe. Et le sujet reste parfois aveugle. Il ne s’agit pas d’un petit disque. Toujours et quand nous accordons du crédit aux choses que les gens racontent. Il arrive aussi, dans le cas de ces puissantes lumières, que le sujet parle de connexion avec cette lumière et il semblerait alors, qu’il parle avec cette lumière et qu’il y ait une sorte de contact télépathique dans lequel la Lumière leur indique des choses, ou ils communiquent avec cette lumière. De même que Moïse en son temps se connectait avec la ronce ou Saül se connectait avec cette lumière qui le fit tomber de cheval. Nos contemporains qui voient des choses dans les cieux communiquent aussi parfois avec ces puissantes sources de lumière qui semblent leur donner des messages et en reçoivent et ainsi de suite. Déjà dans l’Iliade et dans d’autres textes, certains commentent qu’il leur parut mourir et sont revenus, ils ont eu l’impression d’abandonner leur corps et de s’orienter vers une lumière toujours plus vive sans pouvoir bien le raconter, ce n’est pas le cas de l’Iliade, mais de nos contemporains, sans pouvoir bien relater si c’était eux qui avançaient vers la lumière ou la lumière vers eux. Le fait est qu’ils rencontrent cette lumière, et cette lumière, a la propriété de se communiquer avec eux d’une certaine façon, de parler avec eux ou de leur donner des indications. Que les lumières parlent est un peu étrange comme vous le savez. Dons ces lumières donnent des indications et le contact s’établit. Et bien sûr, pour pouvoir raconter cette histoire, que ce soit pour avoir reçu un choc électrique dans le cœur ou autre chose du même style et alors ils sentent qu’ils reviennent ou s’éloignent de cette fameuse lumière avec laquelle ils étaient sur le point d’établir un intéressant contact. Mais bien sûr, s’ils établissaient ce contact, nous n’en serions pas informés (rires). Il est donc bon dans tous les cas qu’ils reviennent. (Rires).
Il existe de nombreuses explications à ces phénomènes, des explications du côté de l’anoxie, d’autres parlent de l’accumulation de dioxyde de carbone, il y a beaucoup d’explications sur ce phénomène de lumière. Mais pour nous, comme d’habitude, les explications qui sont aujourd’hui d’une sorte et demain d’une autre, ne nous intéressent pas beaucoup ; nous nous intéressons plutôt au système de registre, l’emplacement, le registre affectif que vit le sujet, et par-dessus tout autre chose, cette sorte de grand sens que cela semble donner au sujet et qui avec certitude change sa vie. La vie de Moïse change, la vie de Paul change, la vie des sujets qui croient avoir eu une forte expérience avec cette lumière et combien d’autres cas. Ceux qui croient être revenus de la mort, etc. ce changement de sens de sa propre vie du fait de l’expérience du contact avec un phénomène extraordinaire qui soudain fait irruption chez le sujet et que le sujet ne parvient pas à comprendre s’il s’agit d’un phénomène de perception ou de représentation. Mais dans ce cas, pour toutes les situations, ce phénomène semble d’une grande importance, et du fait de sa présence, il a l’aptitude de changer subitement le sens de la vie humaine.
Demain nous poursuivrons sur ce thème.

5° Jour.
Outre les états crépusculaires, nous distinguons aussi des états qui peuvent être occasionnels et des états que nous pourrions très bien appeler états supérieurs de conscience. Nous avons classé les états supérieurs de conscience depuis longtemps comme états d’extase, de transport extatique, et de reconnaissance. Celui qui s’introduit assez souvent dans l’expérience, le fait d’abord par les états les plus primaires, c’est-à-dire les états d’extase. Ces états ont habituellement des concomitances motrices, une certaine agitation, certains mouvements du corps. Les états de transport extatique ont plutôt des concomitances émotives, et souvent une joie intense envahit le sujet, un état ineffable l’envahit. Nous pourrions dire que les états supérieurs de reconnaissance sont plutôt intellectuels, dans le sens où le sujet croit un instant comprendre le “tout“. En un instant le sujet croit qu’il n’y a pas de différence entre ce qui est “lui “ et ce qu’est le “monde“, comme si le moi avait disparu. Notre ami maintenant ne se préoccupe pas de son n° d’identité, de son poids, de sa taille, de tout ce qui lui fait sentir qu’il est lui : “ moi maintenant j’ai un état intéressant“. Mais ce moi semble plutôt avoir complètement disparu, et lui est simplement présent, comme dans certaines représentations de certaines religions, une sorte de grand œil, et non un monsieur qui regarde derrière les trous de serrures. Ces états supérieurs de conscience peuvent avoir leurs concomitances motrices, émotives et intellectuelles.
Il est clair que sans arriver à des choses aussi extraordinaires : qui peut dire qu’il n’a pas une fois dans sa vie, sans rien faire de spécial, senti subitement une joie sans raison, une joie subite croissante étrange, mais une joie tout de même ? Qui peut dire qu’il ne lui est pas arrivé, comme ça, de se rendre compte que les choses sont telles qu’elles sont, mais de s’en rendre compte en profondeur et avec une grande signification ? Imaginez cela-même, et plus encore. (Rires).
Le travail avec l’expérience peut très bien se faire et se poursuivre dans le calme, être développée peu à peu, sans précipitation, sans inquiétude, parce qu’après tout nous ne cherchons pas ces expériences comme un but, mais comme des références capables d’orienter la conscience dans une direction croissante. Il ne s’agit pas de se lancer dans l’expérience pour une sorte d’hédonisme spirituel, pour avoir des expériences, disons pour manger plus de fraises. (Rires). Si vous voulez additionner les expériences vous trouvez n’importe quoi. Il ne semble pas qu’il s’agisse de ça… je vous le dis parce que notre époque est très portée sur la consommation, donc beaucoup d’expériences. (Rires). Il ne s’agit pas de ça, accumuler des expériences, -“ homme de beaucoup d’expérience“- mais d’obtenir quelques références capables d’orienter dans un sens intéressant. On peut travailler avec ces expériences lentement, sans grandes difficultés, comprenant que ce que l’on cherche au fond de tout c’est un sens plus qu’une expérience.
Et qu’est-ce que l’expérience ? C’est une sorte d’intermédiaire avec le sens.

Chacun son "paysage"


Quand je perçois le monde externe, quand je me développe quotidiennement en lui, non seulement je le constitue avec des représentations qui me permettent de m’y reconnaître et d’agir, mais je le constitue en plus avec des systèmes coprésents de représentation. Cette structuration que je fais avec le monde, je l’appelle “paysage“ et je constate que la perception du monde est toujours la reconnaissance et l’interprétation d’une réalité, en accord avec mon paysage. Ce monde que je prends pour la réalité même, c’est ma propre biographie en action et cette action de transformation que j’effectue dans le monde, c’est ma propre transformation. Et quand je parle de mon mode interne, je parle également de l’interprétation que j’en fais et de la transformation que j’effectue en lui. 

Silo: Psychologie de l’Image, 1990  

2016/09/01

Se rendre compte qu’on existe!

On est ce que l’on fait et c’est ce l’on croit. Ton futur sera selon ce que tu crois, c’est ainsi. Selon l’image que j’ai, mon futur sera ainsi. Selon le Dieu que tu appelles, il sera d’une forme ou d’une autre. Le dieu que tu appelles viendra, c’est la même chose avec le guide, viendra celui que tu appelles et non un autre…, cela pourrait être ainsi mais ça dépend de ce que tu veux faire de ta vie. Il existe beaucoup de ces êtres et tu peux les appeler. Nous avons cette capacité de faire ça, mais nous ne nous le proposons jamais. Ceci est possible si je lui donne de la permanence.

Si tu t’acharnes tu peux mettre en marche des forces internes très profondes, de plus, certaines qui attendent que tu les appelles. « Nous sommes une brise dans un coin perdu d’un Univers ». Ceci est beaucoup plus que ce qu’on imagine … Seul, les grandes nécessités peuvent réveiller de leur sommeil millénaire les Guides les plus profonds…

…Être conscient de soi-même est une chose très inspiratrice…Se rendre compte qu’on existe !, faire attention…, diriger l’attention…, est une avancée. Mais ça ne rapporte rien, ça ne donne pas d’argent. A quoi ça sert … ? On est dans l’externe, on rêve. Etre conscient de soi est une chose inspiratrice (c’est une porte qui s’ouvre), me rendre compte que j’existe ! De moi-même ! Investir dans ça c’est ce qui rapporte le plus. C’est le meilleur placement en bourse… se rendre compte… prendre conscience de soi. Si tu y ajoutes ces actions qui transcendent le personnel, si de plus tu l’accompagne de travaux énergétiques… ceci est une technologie de pointe. Pour que l’autre puisse t’entendre il faut que tu profites des recoins du chemin parce que sinon, il ne peut t’écouter, il doit être en échec, s’arrêter.




Silo, Mendoza 24 juin 2003