2020/12/12

Le chemin: une méditation pour chaque jour

Le chemin: une méditation pour chaque jour!


Chaque point est un sujet de méditation. Chacun peut être utilisé pour une séance de quelques minutes, comme sujet de réflexion pour une journée entière ou comme sujet d'échange entre amis. Vous pouvez également faire une méditation plus longue qui comprend les 8 premiers sujets (la voie à suivre) puis une autre qui comprend les 9 derniers sujets (les difficultés à éviter).

La façon idéale de méditer est de s'asseoir dans une posture confortable, de faire une brève relaxation et de lire la phrase pour méditer. Ensuite, vous essayez de faire un silence intérieur, en écoutant ou en imaginant un son lointain, et vous amenez la phrase à méditer en vous permettant de la ressentir, en la laissant produire des registres et des émotions, en évitant de la rationaliser. Les enregistrements sont autorisés à circuler librement. Enfin, nous sortons de la méditation et prenons note de ce que nous avons vécu. Répétez autant de fois que vous le souhaitez avec chaque sujet de méditation, notez les expériences dans chaque cas et voyez comment ces enregistrements évoluent.


La voie à suivre pour aller vers la cohérence:
1. Si vous pensez que votre vie se termine par la mort, ce que vous pensez, ressentez et faites n'a pas de sens. Tout finit dans l'incohérence, dans la désintégration
2. Si vous pensez que votre vie ne se termine pas par la mort, ce que vous pensez doit coïncider avec ce que vous ressentez et ce que vous faites. Tout doit aller vers la cohérence, vers l'unité
3. Si vous êtes indifférent à la douleur et à la souffrance des autres, toute aide que vous demandez ne trouvera aucune justification.
4. Si vous n'êtes pas indifférent à la douleur et à la souffrance des autres, vous devez faire correspondre ce que vous ressentez avec ce que vous pensez et faites pour aider les autres.
5. Apprenez à traiter les autres, comme vous voulez être traité
6. Apprenez à surmonter la douleur et la souffrance en vous-même, chez votre prochain et dans la société humaine
7. Apprenez à résister à la violence en vous et en dehors de vous
8. Apprenez à reconnaître les signes du Sacré en vous et en dehors de vous


2020/09/24

Contrôle et évolution de la conscience.

 (Causerie de Silo avec Enrique Nassar. 1997)

Au cours des derniers siècles, la vision positiviste a réduit l'être humain a un organisme, a un animal rationnel, a quelque chose qui naît, grandit, est formé, travaille, se reproduit, s'enracine et meurt. Allez-vous à votre bureau et asseyez-vous à côté d'un collègue, que pensez-vous de l'autre? Vous sentez qu'il est né, qu'il a grandi, qu'il a été formé, il travaille avec vous, il a des enfants (il a reproduit), il est malade ou peut tomber malade et peut mourir ou mourra forcément. Donc ce que vous ressentez, c'est la vision qu'a le système de l'être humain: c'est un organisme qui naît, grandit, s'entraîne, se reproduit, travaille, s'intègre et meurt.

Le véritable Être Humain, celui qui va vers l'infini, celui qui découvre et manipule l'atome, celui qui transforme l'univers en bits, celui qui décode et peut manipuler le code génétique à volonté et avec cela transformera encore plus sa nature, que quand on lui dit que la technologie génère du chômage, il est prêt à restructurer l'organisation sociale pour libérer l'homme du travail, permettre à la technologie de continuer son développement, ce qui se rebelle d'être considéré comme un animal rationnel qui naît, grandit, se reproduit former, travailler, enfermer et mourir; celui qui regarde son corps et le considérera comme une antiquité primitive pour le développement de sa conscience, celui qui se rebelle contre la mort, cet être humain que la philosophie, la psychologie ou les sciences sociales ne définissent toujours pas, ... cet être humain , le véritable être humain, celui-là apparaît déjà. Cet être humain va-t-il faire des erreurs? Bien sûr, vous allez faire des erreurs, mais il ne pourrait en être autrement, ce processus ne va en aucun cas s'arrêter. Les forces antihumanistes essaient donc d'arrêter ces processus, ... ces processus vont percer. La conscience humaine se libèrera de nombreux liens qui la limitent aujourd'hui: le travail, les limitations du corps, ...

- Que peut-il se passer dans les prochaines années?

Les systèmes créent le substrat des croyances fondamentales auxquelles adhère le citoyen moyen; A partir de ce substrat de croyances de base, le citoyen moyen pense et fait science, politique, culture, économie, ... Un système primitif (comme celui qui existe) ne peut générer qu'un champ de croyances primitives pour qu'il adhère au citoyen. Par exemple, le néolibéralisme est une production à partir de ce substrat primitif, l'analyse des phénomènes actuels est basée sur une méthodologie de ce substrat, c'est-à-dire que tout est très réduit, très primitif, très limitant, ...

Le nouveau libéralisme va tomber (ce qui est difficile à voir avec les outils d'analyse propres au substrat des croyances de base) et pour nous le problème n'est pas qu'il tombe mais tout le désordre social que l'effondrement du système financier peut engendrer; Imaginez le système de production et de distribution alimentaire arrêté, les services publics bloqués, des millions de personnes dans les villes essayant de sortir de là, des débordements psychosociaux de différentes sortes qui auraient, ... Un système s'effondrer sans quelque chose pour le remplacer utile pour rien. Nous ne sommes pas seulement intéressés par la chute du système mais par son remplacement.

- Pour éviter un effondrement sans issue, faut-il prendre le pouvoir?

C'est une option qui pour nous n'est pas très intéressante. L'option intéressante pour nous est que les gens changent.

- Que voulez-vous dire que les gens changent?

Vous souvenez-vous du lion ailé: *

« - C'est vrai, M. Ho. C'est comme ça. Personne sur cette terre ne soutiendra aucun effort, jusqu'à ce que la monstruosité qu'un seul être humain se trouve sous les rangs de la vie dont nous jouissons tous soit terminée.

« Mais dites-moi, Mme Walker, quand tout a-t-il commencé à changer? Quand nous avons réalisé que nous existions et que, par conséquent, d'autres existaient En ce moment, je sais que j'existe! Quelle chose stupide! N'est-ce pas vrai, Mme Walker?

- Ce n'est pas stupide. J'existe, parce que tu existes et vice versa. C'est la réalité, tout le reste est stupide. Je pense que les membres du Comité pour la défense du système nerveux faible ont réussi à remettre les pendules à l'heure. Je ne sais vraiment pas comment ils l'ont fait, mais ils l'ont fait, sinon nous serions transformés en fourmis, ......

Il en est ainsi. Toute l'organisation sociale, si vous pouvez l'appeler ainsi, s'effondre. En si peu de temps qu'il est complètement démonté, ...

- Allez, viens Mme Walker. nous vivons dans un nouveau monde et nous avons encore du mal à trouver des formes libres de communication personnelle.

- Voulez-vous me lire vos poèmes? J’imagine qu’ils sont inefficaces, arbitraires et, sobre tout, réconfortants.

- C'est vrai, Mme Walker. C'est réconfortant à cela. Je vous les lirai à tout moment. Bonne journée. »

Les gens changent, si vous changez leur appareil de croyance de base. Regardons un exemple avec une croyance de l'appareil de croyance de base tel qu'il a été tenu pendant des siècles; souvenez-vous du géocentrisme, la terre était le centre de l'univers et c'était une époque où tout le monde était d'accord pour dire que c'était ainsi, que c'était ainsi que l'on croyait et que c'était ainsi que cela était vécu.

Avec le temps, tout cela change: d'abord, on dit que le soleil est le centre de l'univers, puis il s'éclaircit et on dit que le système solaire est l'un des nombreux systèmes plus grands appelés galaxies, plus tard, il est expliqué plus et on dit que cette galaxie fait partie d'un système de galaxies et qu'à son tour ce système de galaxies fait partie de l'univers, dernièrement on explique qu'il y a plusieurs univers; tout cela fait changer les idées, aujourd'hui personne ne pense à dire que nous sommes le centre de l'univers, mais attention à la façon dont nous parlons, nous disons: "le soleil se lève à ..., le soleil se couche à... comme si nous étions le centre de l'univers.

Mais ce n'est pas tout, aujourd'hui après les investigations qui parlent de systèmes solaires, de galaxies, d'ensembles de galaxies, d'univers et d'univers divers; Aujourd'hui, malgré l'évidence de l'immensité de l'univers, nous détenons trois choses: la vie sur terre est la seule vie dans l'univers, la vie sur terre est la seule forme d'intelligence dans l'univers, et l'homo sapiens c'est la seule forme de vie humaine; Nous considérons que nous sommes la seule forme de vie, de vie intelligente et de vie humaine. Nous croyons que nous sommes uniques, tout l'univers est pour nous, nous sommes le centre de l'univers, c'est-à-dire que nous continuons à être géocentriques. C'est une croyance de l'appareil de croyance de base que nous n'avons pas encore modifiée.

Ce que nous observons aujourd'hui, c'est que l'être humain veut briser cette croyance fondamentale, cela s'observe dans les efforts de la science et de la technologie dans leur recherche interstellaire et dans leur recherche d'autres formes d'existence extraterrestre, cela s'observe dans le désir des gens de trouver une vie extraterrestre, tant est le désir des gens qu'il y a des illusions collectives d'observations d'OVNI et c'est un thème répandu. Les gens essaient tellement de trouver une intelligence extraterrestre que nous sommes sur le point que cela se produise. Homo sapiens se pousse à ouvrir son univers, à dépasser son appareil de croyance basique. Dans cette recherche, l'être humain découvrira la conscience.

- Que voulez-vous dire quand vous dites: "l'être humain découvrira la conscience"?

De DESCARTES, la conscience a été définie comme une chose, comme quelque chose avec extension. De là, la conscience est considérée comme un cas de plus de matière en évolution, comme un viscère manipulable au moyen de drogues et de stimuli électriques. La conscience n'est pas un organisme réactif passif, c'est bien plus que cela, c'est une structure évolutive intentionnelle. La vraie dynamique de la conscience est de transformer, transformer le corps et transformer le monde.

Celui qui, grâce à la recherche astronomique, on découvre que le monde ne bouge pas mécaniquement comme ils ont voulu l'expliquer à travers la théorie du big bang, du choc mécanique aléatoire qui dérive plus tard du hasard dans le processus évolutif que nous connaissons, il y a plutôt des univers qui fusionnent et se déplacent selon une direction intentionnelle mais non mécanique; en d'autres termes, l'univers dans son développement a un sens. Preuve qu'il existe d'autres formes de vie intelligente dans l'univers; c'est-à-dire que nous ne sommes pas uniques. La compréhension que la conscience n'est pas quelque chose de mécanique et de réactif mais une structure évolutionnaire intentionnelle. Être sur le point d'accepter que le corps humain soit une antiquité primitive qui ne correspond pas dans son développement à la vitesse d'évolution de la conscience et avoir les connaissances et la technologie pour le modifier. Être proche de la libération de l'homme de l'esclavage du travail, .... tout ce sont des signes évidents que l'être humain cherche à se libérer de son appareil de croyances fondamentales.

Là où toutes ces choses deviennent évidentes, l'appareil des croyances de base va être déstructuré: qu'il y a une intention dans l'univers, qu'il y a d'autres formes de vie intelligente, que la conscience individuelle est évolutionnaire intentionnelle, que le corps est une antiquité primitive susceptible d’être modifié, qu'il convient d'arrêter de travailler et de faire fonctionner les machines. L'être humain ne se sent pas selon ses idées, il se sent selon ses croyances. Avec la déstructuration de l'appareil de base des croyances de l'être humain, son image du monde sera brisée et avec elle un tout nouveau système de possibilités de développement de la conscience s'ouvrira.

Après les cinquante dernières années de paralysie, la science et la pensée tentent à nouveau de percer. L'être humain est sur le point de se transformer non seulement techniquement mais aussi dans sa conscience. Tout est en structure. Imaginez-vous dans le futur: une super civilisation humaine, un monde où tous les êtres humains s'accordent sur les prémisses de base et chacun est une diversité; Nous ne parlons pas de diversité de cultures, nous parlons de diversité de personnes: c'est-à-dire que chaque personne est un monde. La chose normale dans l'évolution est la multiplicité, la diversité. Bien que l'évolution de la conscience suive une direction, il peut y avoir des milliers de chemins dans cette direction.

Les êtres humains du futur pour comprendre les comportements de l'être humain d'aujourd'hui devront étudier en profondeur l'appareil des croyances fondamentales de l'époque et alors ils ne diront pas qu'ils se sont trompés dans leur raisonnement mais qu'ils ont perçu, analysé, raisonné, prédit, projeté et décidé à partir d'un système de raisonnement très primitif généré par un champ de croyances très pauvre.

La pensée de cette époque du point de vue des humains du futur sera celle d'une pensée primitive enfermée dans une ligne mentale très étroite à partir de laquelle certains phénomènes n'étaient pas visibles, certaines relations n'étaient pas possibles, certaines conséquences ne pouvaient être prédites. On dira que cette improvisation absurde dans les décisions, les analyses et les prévisions correspondait à un comportement mental nihiliste à partir duquel il était impossible de construire quelque chose et sa ressource fondamentale d'action était l'imposition brutale d'un type physique, économique, ... On expliquera qu'il s'agissait là des restes du Cro-Magnon qui sont toujours restés non résolus.

Aujourd'hui, le pouvoir est entre les mains d'un gang de primitifs, ignorants et irresponsables, très brutaux. L'acte stupide de ces primitifs crée des erreurs très graves dans la construction sociale du monde qui créent un champ de catastrophe. Cette catastrophe pourrait se produire et cela retarderait le processus de développement humain. La conscience humaine étant intentionnelle, les visions apocalyptiques d'entropie, d'effondrement, de catastrophe (vision nihiliste) ne sont pas inexorables.

L'être humain du futur ne voudra pas gagner et posséder des choses il voudra ressentir, créer, construire, apprendre sans limite. Il ne voudra pas posséder, avoir, contrôler, cet humain comprendra qu'il y a des millions de façons de développer l'émotion et la pensée, qu'il existe une diversité inimaginable de façons de ressentir et de penser. Maintenant, la vision de l'être humain est très comportementale et réduite, mais dans le futur TOUT IRA BIEN, TOUT IRA LÀ OÙ IL DOIT ALLER.

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* http://www.silo.net/en/collected_works/day_winged_lion

2020/08/30

Les états intérieurs (d’auprès le livre Le regard intérieur, de Silo)


XIX. LES ÉTATS INTÉRIEURS

Tu dois acquérir à présent une perception suffisante des états intérieurs dans lesquels tu peux te trouver au cours de ta vie et, en particulier, au cours de ton travail évolutif. Je ne peux les décrire autrement qu'avec des images (dans ce cas, des allégories). Celles‑ci, me semble‑t‑il, ont pour vertu de concentrer “visuellement” des états d'âme complexes. D'autre part, la particularité d'enchaîner de tels états comme s'ils faisaient partie de différents moments d'un même processus introduit une variante dans les descriptions toujours fragmentées auxquelles nous ont habitués ceux qui s'occupent de ces choses.
  1. Le premier état, où le non‑sens prévaut (celui que nous avons mentionné au début), sera appelé état de “vitalité diffuse”. Tout est orienté en fonction des besoins physiques, mais ceux‑ci sont souvent confondus avec les désirs et les images contradictoires. Là, il y a de l'obscurité dans les intentions et les activités. On demeure dans cet état en végétant, perdu parmi des formes variables. A partir de ce point, on ne peut évoluer que par deux voies : celle de la mort ou celle de la mutation.
  2. La voie de la mort te met en présence d'un paysage chaotique et obscur. Les anciens connaissaient ce passage et le situaient presque toujours “sous terre”, ou dans les profondeurs abyssales. Certains visitèrent aussi ce royaume, pour “ressusciter” ensuite en des niveaux lumineux. Comprends bien qu'“en dessous” de la mort existe la vitalité diffuse. Le mental humain met peut‑être en relation la désintégration mortelle avec des phénomènes postérieurs de transformation, et il associe peut‑être aussi le mouvement diffus avec celui qui précède la naissance. Si ta direction est dans le sens ascendant, la “mort” correspond à une rupture avec ton étape antérieure. Par la voie de la mort, on accède à un autre état.
  3. En y arrivant, on trouve le refuge de la régression. De là partent deux chemins : celui du repentir et celui‑là même qui fut emprunté pour la montée, c'est‑à‑dire le chemin de la mort. Si tu prends le premier, c'est parce que ta décision tend à rompre avec ta vie passée. Si tu retournes par le chemin de la mort, tu retombes dans les abîmes avec la sensation de tourner en rond.
  4. Ceci dit, je t'ai parlé d'un autre sentier, qui permet d'échapper à la vitalité abyssale, celui de la mutation. Si tu choisis cette voie, c'est parce que tu veux émerger de ton pénible état, sans toutefois être disposé à abandonner certains de ses bénéfices apparents. Il s'agit donc là d'un faux chemin, connu sous le nom de “chemin de la main gauche”. De nombreux monstres sont sortis des profondeurs de ce tortueux passage. Ils ont voulu prendre le ciel d'assaut sans abandonner les enfers et, ce faisant, ils ont projeté sur le monde médian une contradiction infinie.
  5. Je suppose que, t'élevant depuis le royaume de la mort et par ton repentir conscient, tu es déjà parvenu à la demeure de la tendance. Tu ne peux pratiquement pas t'y arrêter. Deux minces corniches soutiennent ta demeure : la conservation et la frustration. La conservation est fausse et instable. En la parcourant, tu t'illusionnes avec l'idée de permanence, mais en réalité tu descends à grande vitesse. Si tu prends le chemin de la frustration, ta montée est pénible, quoiqu'elle soit l'unique‑non‑fausse.
  6. D'échec en échec, tu peux arriver au prochain palier, appelé “demeure de la déviation”. Attention aux deux voies que tu as maintenant devant toi : tu peux prendre soit le chemin de la résolution, qui te mène à la génération, soit celui du ressentiment, qui te fait redescendre vers la régression. Tu es là, placé face au dilemme : ou bien tu te décides en faveur du labyrinthe de la vie consciente (et tu le fais avec résolution), ou bien tu retournes plein de ressentiment à ta vie précédente. Nombreux sont ceux qui, n'étant pas parvenus à se dépasser, se privent là de toutes leurs possibilités.
  7. Mais toi, qui t'es élevé avec résolution, tu te trouves à présent dans la demeure connue sous le nom de “génération”. Tu as là trois portes : l'une s'appelle “Chute”, l'autre “Tentative”, et la troisième “Dégradation”. La Chute te mène directement aux profondeurs et seul un accident extérieur pourrait te pousser vers elle. Il t'est difficile de choisir cette porte. Alors que celle de la Dégradation te mène indirectement aux abîmes, en te faisant rebrousser chemin dans une sorte de spirale pleine de turbulences où tu ne cesses de reconsidérer tout ce qui a été perdu et sacrifié sur l'autel d'un dieu inconnu. Cet examen de conscience qui mène à la Dégradation est, bien sûr, un faux examen, dans lequel tu sous‑estimes et disproportionnes certaines choses que tu compares. Tu confrontes l'effort de la montée avec tous les “bénéfices” que tu as abandonnés. Mais si tu regardes les choses de plus près, tu t'apercevras que tu n'as rien abandonné pour cette raison, mais pour d'autres. La Dégradation commence donc par falsifier les raisons qui, en apparence, ont toujours été étrangères à la montée. Je demande maintenant : Qu'est‑ce qui trahit le mental ? Peut‑être les fausses raisons de l'enthousiasme initial ? Peut‑être la difficulté de l'entreprise ? Peut‑être le faux souvenir de sacrifices qui n'ont pas existé ou qui ont eu d'autres motifs ? Je te dis et je te demande maintenant : Ta maison a brûlé il y a longtemps. Est‑ce pour cela que tu as décidé de monter, ou penses‑tu maintenant que c'est parce que tu es monté qu'elle a brûlé ? As‑tu par hasard regardé un peu ce qui était arrivé à d'autres maisons des alentours ?… Il ne fait pas de doute que tu doives choisir la porte du milieu.
  8. Gravis le perron de la Tentative et tu parviendras à une coupole instable. Arrivé là, déplace‑toi le long d'un couloir étroit et sinueux que tu connaîtras comme étant celui de la “versatilité”, jusqu'à atteindre un espace vaste et vide (comme une plate‑forme), qui se nomme : “espace‑ouvert‑de‑l'énergie”.
  9. Dans cet espace, tu peux être épouvanté par le paysage désertique et immense ainsi que par le silence effrayant de la nuit transfigurée par d'énormes étoiles immobiles. Là, exactement au‑dessus de ta tête, tu verras, clouée dans le firmament, la forme insinuante de la Lune Noire. Là, tu dois attendre l'aube avec patience et foi, car rien de mal ne peut t'arriver si tu restes calme.
  10. Il pourrait arriver que, dans une telle situation, tu veuilles tenter une sortie immédiate. Si cela se produit, tu risquerais de te diriger à tâtons vers n'importe quel endroit, au lieu d'attendre le jour avec prudence. Tu dois alors te rappeler que là (dans l'obscurité), tout mouvement est faux et reçoit généralement le nom “d'improvisation”. Si, oubliant ce que je dis maintenant, tu commençais à improviser des mouvements, sois sûr que tu serais alors entraîné par un tourbillon, parmi les sentiers et les demeures, jusqu'aux plus sombres fonds de la dissolution.
  11. Qu'il est difficile de comprendre comment les états intérieurs sont enchaînés les uns aux autres ! Si tu savais quelle est la logique inflexible de la conscience, tu constaterais que dans la situation décrite, celui qui improvise aveuglément commence fatalement à dégrader et à se dégrader ; surgissent ensuite en lui les sentiments de frustration ; et il tombe dans le ressentiment et dans la mort ; survient alors l'oubli de tout ce qu'un jour il avait pu percevoir.
  12. Si, sur l'esplanade, tu arrives à atteindre le jour, surgira devant tes yeux le soleil radieux qui t'éclairera pour la première fois la réalité. Alors tu verras que dans tout ce qui existe vit un Plan.
  13. Il te sera difficile de tomber de là, à moins que tu ne veuilles volontairement descendre vers des régions plus obscures pour porter la lumière aux ténèbres.
Mieux vaut ne pas développer davantage ces thèmes car, sans expérience, ils trompent en transposant dans le domaine de l'imaginaire ce qui est réalisable.
Que ce qui a été dit jusqu'ici te serve. Si ce qui a été expliqué ne t'était pas utile, que pourrais‑tu objecter puisque rien n'a de fondement ni de raison pour le scepticisme, qui est comme l'image d'un miroir, le son d'un écho, l'ombre d'une ombre.





2020/03/29

Le Belvédère des étoiles (fragment)

Dehors, il y a le mandarinier en fleurs. En entrant, je trouve un escalier qui monte en spirale. C'est une pagode de plusieurs étages. Au pied de l'escalier, une cloche en fer. Je la frappe et le toit s'ouvre. Des moines, peut-être chinois, se promènent dans les cours et les jardins. Je ne peux pas vraiment dire avec certitude qu'ils sont chinois ; bien que leurs yeux soient petits et bridés, leurs visages sont bruns et bronzés. Ils pourraient être Népalais. Ils se déplacent d'un pas lent, comme quelqu'un qui profite de marcher pour réfléchir et méditer. Je monte le grand escalier en bois poli et travaillé. Je remarque dans les détails le soin mis par ceux qui, à l'époque, ont donné le meilleur d’eux pour construire le temple. Je porte une longue robe de soie, finement brodée et de belles pantoufles couvrent mes pieds. Je croise un moine qui descend lentement, son regard se pose sur chaque marche. Je le salue en chinois parfait et il me répond d'un doux mouvement de la tête. Je continue à monter et en chemin, je trouve d'autres moines qui descendent. Je répète le salut à chacun. Ils me regardent à peine et le contact se fait au travers de minuscules révérences qui n'interrompent pas leurs méditations silencieuses. Je continue à monter lentement. À mesure que j'avance par la spirale, j'observe attentivement et avec une certaine excitation ce monde de silences et de murmures autour de moi. À chaque marche, il y a des points de vue depuis lesquels je peux voir les forêts de la région. Je poursuis jusqu'en haut de la pagode où se termine l'escalier, devant de simples et beaux vitraux qui représentent des paysages lumineux, pleins de vie et de couleurs. De cet endroit, j'ai une vue imprenable sur toute la vallée, et je reconnais là-bas en bas les flèches et les coupoles des églises et  des temples que j'ai un jour visités.

Je sors par une petite ouverture sur le toit de la pagode. Je pourrais facilement perdre l'équilibre, aussi je m'appuie sur une canne qui se transforme en parapluie. Quand je l'ouvre, il me soulève dans les airs. Comment tient-il en l'air vu sa petite structure ? Bien soutenu, je commence à regarder autour de moi et je vois d'autres personnes voyageant dans les airs avec leurs propres parapluies. C'est déjà assez inhabituel, mais le plus surprenant est que les voyageurs-parapluies ne sont pas seuls. Il y a un trafic de toute sorte dans cet espace aérien. À mes côtés, je vois beaucoup d'oies. Je suis fasciné par leur battement d'ailes large et synchronisé. Comme si jusqu'ici les surprises n'avaient pas été assez nombreuses, dans un mouvement rapide et sûr, l'une d'elle m'attrape et, m'allongeant sur ses jambes, me transporte vers le haut. La surprise ne dure que quelques secondes, substituée par la sensation extraordinaire de nous envoler merveilleusement bien, en montant beaucoup plus haut que les autres. Elle m'enveloppe dans son ventre et de là, je peux voir au loin, embrassant du regard la quasi-totalité de la courbure de la Terre.

Le vol est doux, silencieux, chaud. Maintenant installé sur son dos tout doux, je me sens aimé et protégé. Dans la nuit étoilée se détache une lune immense. Nous volons ainsi pendant plusieurs heures jusqu'au Belvédère des Étoiles d'où je descends du dos de l'oie. Elle se transforme en un homme en costume à plumes et reste à ma droite. Presque sans le regarder, je comprends immédiatement qu'il est le Guide. Côte à côte, en silence, nous contemplons les étoiles. Après un temps que je ne saurais préciser, d'une voix calme et ferme, il me dit de chercher mon étoile. Sa question me surprend parce que je ne sais pas quelle pourrait être mon étoile. Je regarde vers la mer de lumières qui s'étend du sommet dans toutes les directions, essayant de savoir laquelle de ces lucioles du ciel pourraient être la mienne. Je ne peux même pas imaginer que l'une d'elle m'appartienne et habitué au concept du "mien" comme quelque chose qui m'appartient, je ne parviens pas à saisir qu'il fait aussi référence à celle à laquelle moi j'appartiens. Avec plus d'insistance et de fermeté, il dit :
- Dis-moi quelle est ton étoile.
- Je ne sais pas, je réponds.
La situation commence à me désespérer. Je n'ai vraiment pas la moindre idée de quelle est mon étoile et je ne sais pas non plus comment résoudre ce qui me semble plus une énigme qu'une information oubliée. Alors que j'essaie de résoudre la question, il me répète encore une fois :
- Dis-moi quelle est ton étoile !
Et élevant la voix avec gentillesse mais sans concession, il répète :
- Ton étoile, montre-la-moi !
Je suis désespéré.
- Je ne sais pas laquelle ! Je ne sais pas !
Avec gentillesse, il élève la main et, la dirigeant vers le haut, il tend un doigt
indiquant une partie du ciel. Je monte sur le doigt qui avance à grande vitesse, parcourant une distance énorme en quelques secondes. Je pars pour ce qui semble être un voyage au hasard vers la voûte des lumières. Cependant, nous nous dirigeons vers une étoile particulière près de laquelle nous arrivons en quelques secondes. Comprenant son aide, je dis :
- C'est celle-là mon étoile. Il rit et la traverse avec son doigt comme s'il ne s'agissait que d'une illusion
optique. Elle est plate, comme une feuille de papier blanc. Alors le doigt se lance vers le haut à une vitesse impressionnante. Il traverse vertigineusement les étoiles et les galaxies. Il continue de monter, passant les soleils et les planètes, à travers des nébuleuses, laisse derrière elles des agglomérations stellaires. Il grimpe des distances inimaginables jusqu'à ce qu'il atteigne la fin de l'espace. Tout est noir et l'on dirait qu'il n'y a plus rien. Mais ça continue de monter. Nous traversons la zone d'obscurité totale et au bout d'un moment, surpris, je vois de nouvelles lumières.

Nous approchons d'une zone de luminosité diffuse et je sais immédiatement que c'est mon étoile. En fait ce n'est pas exactement une étoile mais un petit nuage blanc, avec beaucoup de lumière. Je sais que c'est ma place, ma maison, mon origine et mon destin. Je suis bouleversé et je me mets à pleurer. Je ressens une plénitude que je n'avais jamais ressentie auparavant dans ma vie. C'est un mélange d'émotion, de joie profonde, de gratitude. Je reste longtemps ainsi à contempler, à remercier.

Quand je suis sur le point de commencer le retour, j'observe au-dessus de mon étoile, légèrement vers la gauche, un petit trou dans le fond noir à travers lequel on peut voir de l'autre côté. Je ne peux pas dire à quelle distance il se trouve mais je le regarde d'où je suis et curieusement, je peux voir à travers. De l'autre côté, il y a "tout de nouveau". Il y a des Univers complets, des mondes entiers. Ce qui est curieux, c'est que je ne les vois pas mais que je les sens. C'est le Tout. Je suis émerveillé.
- Qu'est-ce que c'est ?, je demande au Guide.
- C'est le Passage par lequel on naît.
- Je veux passer par là.
- Pas encore. Pas encore. Tu ne peux pas comme ça.
- Pourquoi ?
- Par là on passe, mais on ne revient pas, on passe pour toujours. C'est la matrice à travers laquelle on naît vraiment, bien que ce soit ce que vous appelez la mort.
Alors je ressens quelque chose de si incroyablement beau que rien ne lui est comparable. C'est la plus grande commotion que j'aie jamais ressentie. C'est si profond que je ne peux le décrire.
Tout est bien, tout est très bien.
Quelque chose se relâche dans la partie la plus profonde de mon Être.

Maintenant je sais que la mort n'existe pas. La certitude est absolue, c'est l'expérience indubitable. Il n'y a pas de mort. Ce que j'ai cru toute ma vie n'existe pas. Le Passage est là, devant moi, et c'est par là que je passerai. Tout va bien, tout va bien.Le doigt me ramène. Sans hâte, il descend et nous traversons l'étoile plate. Nous atteignons le Belvédère. Je remercie le Guide. L'oie me prend sur son dos et nous sommes déjà dans la pagode. J'entre par la porte haute et je commence à descendre les escaliers sans faire de bruit. Les moines chantent. Je vais avec l'un d'eux vers la cloche et quand nous y arrivons, il dit qu'il m'aidera et posément, il ajoute :
- À partir de maintenant, chaque fois que tu voudras voir ton étoile et aller devant le Passage, tu pourras le faire, en sonnant la cloche.
Je m'approche de la cloche, je la frappe et le toit de la pagode s'ouvre doucement.
Tout en haut, je vois le Passage.
Le moine répète encore une fois :
- Quand tu sonneras la cloche, tu pourras voir ta nébuleuse et le Passage par lequel on naît.
Et pour finir, il ajoute :
- Pour sonner la cloche, tu n'as pas besoin de venir jusqu'ici. Quand tu en auras besoin, tu sauras comment la trouver.
Puis il disparaît et je découvre que je suis dans la maison de mon quotidien. Je sors et je regarde le mandarinier en fleurs. Le plus exquis des parfums m'accueille.
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