2016/07/05

Expériences des forts contacts avec le Profond

L'idée d'ajouter une annexe ne faisait en rien partie de mon intention de départ. L'annexe est venue, comme la monographie, d'un message du Profond. Alors que la traduction en français était presque terminée, j'étais prête à la mettre sur le site du Parc de La Belle Idée. Mais aujourd'hui, après la pratique de l'Ascèse, ce message me disant que je devais faire une annexe pour y mettre mes témoignages sur les signes, m'est arrivé. Je me suis sentie assez déstabilisée parce qu'il s'agissait de "montrer à tout le monde" mes expériences.
Jusqu'à présent, je n'avais partagé mes expériences qu'avec quelques amis, je crois que j'ai toujours eu une certaine pudeur à parler de mon monde interne. Et là, on me demande de les publier !

Dans la monographie, nous avons dit :
"D'après mon expérience, le signal a été capté dans des moments de forts contacts avec le Profond. Le signal a fait irruption après une Demande très sentie, dans des cas de situation limite ou quand le Dessein avait une forte charge affective. Le signal, en veille, apparaît comme un rayon de lumière puissant et fugace, comme s'il se produisait une décharge électrique qui traversait tout le corps. Immédiatement, on le décode ou on le déroule, parfois rapidement et parfois les traductions arrivent à des moments inattendus, en général quand on ne les cherche pas, quand le Moi est occupé à des tâches du plan moyen. Quand on traduit correctement le signal, il y a un registre clair de certitude. Dans les rêves, les signaux apparaissent presque toujours allégorisés même si certains ont surgi sans aucun "déguisement", de façon très claire et directe. Ces signaux sont, en général, en relation avec le processus de l'humanité, ils ne sont presque jamais adressés à moi seule. Je suis seulement un canal à travers lequel le signal s'exprime. Chaque fois que j'ai agi en direction de ce signal, j'ai eu un registre d'unité interne."
Les expériences que j'ai regroupées sont celles que j'ai vécues lors de la réalisation de Cérémonies (Offices, Bien être et assistance) et une autre expérience que j'ajoute dans cette seconde version, vécue lors d'une retraite de Maîtres au Parc de La Belle Idée. Les témoignages sont tels que je les ai écrits dans leur moment, j'ai seulement enlevé le nom des personnes impliquées.
11 avril 2003
Lors du passage de la Force, je commence à sentir une forte tension dans la poitrine. La sensation est qu'elle va se fendre en deux. La douleur parvient jusqu'aux seins. Je demande au Guide qu'il m'aide. La tension baisse. Ensuite, dans l'expérience de
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Bien-être, je reconnecte à cette sensation douloureuse. Mon amie apparaît. Nous nous connectons par un petit tube qui sort de ma poitrine jusqu'à la sienne. Je sens que cette fois-ci, c'est elle qui m'aide. Ensuite, nos poitrines se rapprochent, se touchent presque et je sens sa chaleur. Là, je me détends un peu.
5 septembre 2003
J'intègre cette amie comme un Guide, ma Grand-Mère apparaît aussi.
Durant ce processus d'accompagnement de cette amie, une relation d'amitié avec beaucoup d'amour s'installe en moi. Parfois je l'aide, parfois elle m'aide. Tout cela sur le plan haut car je ne l'ai jamais vue et je n'ai jamais parlé avec elle.
11 septembre 2003
Dans la cérémonie d'Office de la clôture du Conseil 9 apparaît ce nouveau Guide Ailé qui s'était présenté la première fois dans un rêve. Un ange avec une grande force et qui me donne un immense registre de protection.
26 septembre 2003
Une amie me met en situation d'appeler mon amie au Chili pour lui raconter les expériences que j'ai eu avec elle. Beaucoup de résistances mais finalement, je le fais. J'appelle au Chili et c'est elle qui me répond directement au téléphone. Je me présente et je lui raconte mes expériences. Elle me dit que ce que je lui raconte est un cadeau, elle m'en remercie profondément. Je sens une grande émotion. Je lui demande si elle croit possible de construire une relation avec une autre personne depuis le plan haut et elle me dit qu'elle a la certitude que c'est possible. "La mort n'existe pas" me dit-elle. Nous nous quittons avec beaucoup d'émotion et quelques jours plus tard, elle quitte ce plan moyen.
Après quelques temps, cette amie se configure comme une guide "guérisseuse" qui vient m'aider chaque fois que j'en ai besoin pour envoyer du bien-être aux autres.
Je sens que nous sommes restées liées l'une à l'autre par les actes unitifs, dans une relation qui transcende cet espace-temps.
Les expériences avec cette amie furent des références qui m'ont permis de dévoiler progressivement le Dessein.
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Janvier 2004
Dans la cérémonie de Bien-être, ma grand-mère arrive. Elle me chuchote à l'oreille d'avoir une attitude d'ouverture avec papa.
Je voyage en Argentine en février. Je me sens disponible, ouverte à papa. Un jour, il me dit qu'il doit me raconter quelque chose. Il me confie une grande souffrance du passé qu'il ressent encore aujourd'hui.
5 septembre 2009
Décès de papa samedi matin d'un arrêt cardio-respiratoire. Maman me laisse un message sur le répondeur. Je pleure de tristesse, registre fort de devenir orpheline. Un vide s'installe comme si j'avais perdu une partie de moi-même.
Après avoir tout organisé pour le voyage en Argentine, nous faisons avec mon compagnon, une cérémonie pour accompagner papa dans son voyage vers la Lumière.
Je ferme les yeux et commence à sentir la Force. En peu de temps, je sens la présence de papa, il est entouré de ce qui semble être un nuage obscur et épais. Je commence à lui envoyer de l'énergie pour qu'il entame l'ascension. Résistance forte de sa part, comme s'il faisait un effort pour rester. Je continue d'envoyer de l'énergie, toujours vers le haut. Je commence à sentir que le nuage se dissipe et il ne reste qu'une Lumière, cette Lumière est face à moi. La Lumière commence à monter et depuis en haut, ma grand-mère le reçoit dans ses bras. Elle me dit quelque chose comme : "Mon pauvre petit, il était très fatigué." Registre de certitude que papa est en chemin vers la Lumière et qu'il est guidé par sa mère.
Quand je commente cette expérience à mon compagnon, je pleure beaucoup, mais cette fois-ci avec une émotion positive, avec un registre d'unité d'avoir aidé papa dans ce passage difficile. Mon compagnon me raconte son expérience qui est pratiquement la même que la mienne, seulement qu'il a vu papa enveloppé de Lumière me regardant avec beaucoup d'amour.
7 septembre 2009
Après 24 heures de voyage, j'arrive à la maison de mes parents. Avant de m'endormir, je sens la présence de papa. Une lumière chaleureuse entre dans mon corps comme s'il voulait m'accompagner de l'intérieur.
Le matin, je vais au cimetière, je laisse à son corps des fleurs et une rose rouge. Je lis la cérémonie de la Mort. Je reste en silence mais je ne connecte à rien de spécial dans le cimetière. Il n'est déjà plus là.
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20 septembre 2009
Nous faisons une cérémonie avec mon compagnon pour accompagner une amie qui s'est cassé le tibia et le péroné.
Beaucoup de connexion avec elle, je sens encore une fois comme un soleil quand je la registre. L'énergie est légère et j'ai des registres de joie.
À un moment, je sens la présence de papa qui vient depuis la gauche et reste derrière moi. L'énergie monte à la tête et j'expérimente des moments de silence mental. Ensuite, une Lumière très forte m'envahit. Cette Lumière me donne Amour, je me sens pleine d'Amour et de Lumière. Je me rends compte que c'est papa et je le remercie du plus profond de mon cœur.
19 février 2011
Je reçois l'appel d'une amie qui me raconte l'accident du fils d'un de ses amis, sans me donner beaucoup de précisions. Elle demande que nous fassions des cérémonies de bien-être pour lui.
À 14h30, nous faisons la première avec mon compagnon.
Je ne connais pas ce jeune mais ceci ne me préoccupe pas, je sais que je vais connecter. Quand je sens la Force, je demande à mon Guide qu'elle vienne m'aider, qu'elle me montre ce qu'il y a à faire. Immédiatement, j'ai une image d'elle, derrière le garçon, lui massant la tête. Lui est dans le coma. Ensuite, elle me dit qu'il doit choisir s'il veut rester ou partir et que, quelle que soit la décision qu'il prenne, ce sera bien. Que je lui envoie de la Lumière pour qu'il prenne la meilleure décision. Je le fais, je me connecte à lui, je le sens un peu perdu, sans savoir quoi faire, alors je lui envoie la Lumière pour qu'il décide et je lui chuchote à l'oreille qu'il doit choisir. Ensuite, j'envoie de la Force à sa famille pour qu'ils acceptent sa décision.
Je reste très émue par l'expérience, c'est la première fois que je connecte à cette possibilité avec un jeune homme. Je me suis toujours identifiée en tant que mère, en ressentant l'injustice de la mort d'un fils. Cette expérience changea complètement ma vision et mon registre sur la vie et la mort d'un jeune.
Le dimanche, une nouvelle expérience de bien-être. Connexion au garçon, je sens qu'il commence à choisir et qu'il se décide pour la vie. Alors, je lui envoie de la Force pour qu'il se rétablisse complètement. Une voix me dit : "Ce doit être depuis l'Amour."
Nous recevons des mails de son père qui corroborent ce que j'ai senti, c'est-à-direque le garçon commence à se réveiller.
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11 avril 2012
Jeudi passé, dans la cérémonie de Bien-être, nous avons demandé pour un ami et sa maman. J'appelle la Guide et je demande ce qu'il y a à faire. Il me vient une image d'une femme sur un lit d'hôpital, notre ami est à ses côtés et lui tient la main. Je sens que c'est le geste qu'elle attendait, qu'à travers ce geste passe toute l'affection qu'il sent pour sa maman. Le samedi, une amie me raconte qu'elle a parlé avec notre ami et qu'elle lui a décrit cette vision. Notre ami était ému et il lui a dit que c'était par ce geste, de lui prendre la main, qu'il se connectait toujours avec elle.
Dans cette même cérémonie me vient l'image d'une tante et je lui envoie aussi dubien-être. Avant-hier, j'ai parlé avec ma sœur et elle m'a dit que la tante lui avait raconté qu'elle avait un kyste énorme à l'utérus et qu'elle doit être opérée à la fin du mois.
23 mars 2013
Nous sommes à la retraite de Maîtres au Parc de La Belle Idée. Le dimanche, je me lève et je discute avec une amie avec qui j'ai beaucoup de connexion. Je sens l'inspiration venir (maintenant je connais certains signes) et je sens comme un flash que me traverse le corps et qui me laisse toute tremblante. À ce moment-là, on nous appelle parce que la réunion commence et j'oublie ce qui est arrivé. Le lundi je rentre chez moi. Alors que je suis en train de faire des tâches domestiques, apparaît la "décodification" de ce flash de dimanche dernier :
Sur le chemin de l'Ascèse, nous rencontrons des contenus biographiques que, dans la mesure où nous avançons, vont se faire plus anciens et plus profonds. Mais dans les Espaces Sacrés, existent des contenus qui ne sont pas liés à notre biographie personnelle. Ce sont les contenus de la mémoire ancienne de l'humanité. Avec l'Ascèse, nous réconcilions les contenus qui sont restés isolés, désintégrés dans l'histoire humaine. D'où l'importance des monographies, les expériences communes dans lesquelles nous nous sentons "appelés" par certains êtres. D'où l'importance que le Message de Silo parvienne à de nombreuses personnes. Nous avons besoin de nous réconcilier avec le passé de l'humanité pour faire le saut !


2016/06/29

Méditation quotidienne : La demande

A un moment donné du jour ou de la nuit, inspire une bouffée d’air et imagine que tu amènes cet air à ton cœur. Alors, demande avec force pour toi et pour tes êtres les plus chers. Demande avec force, pour t’éloigner de tout ce qui t’apporte confusion et contradiction ; demande, afin que ta vie soit en unité. Ne dédie pas beaucoup de temps à cette brève oraison, à cette brève demande, parce qu’il te suffira d’interrompre un seul instant le cours de ta vie pour que, dans le contact avec ton intérieur, s’éclaircissent tes sentiments et tes idées.

En savoir plus : 


"...Comme nous sommes aujourd’hui dans une célébration - et que dans certaines célébrations les gens échangent des présents - je voudrais te faire un cadeau et, bien sûr, c’est toi qui verras s’il mérite d´être accepté. Il s’agit, en réalité, de la recommandation la plus facile et la plus pratique que je sois capable d’offrir. C’est presque une recette de cuisine, mais j’ai confiance dans le fait que tu iras au-delà de ce qu’indiquent les mots...

A un moment donné du jour ou de la nuit, inspire une bouffée d’air et imagine que tu amènes cet air à ton cœur. Alors, demande avec force pour toi et pour tes êtres les plus chers. Demande avec force, pour t’éloigner de tout ce qui t’apporte confusion et contradiction ; demande, afin que ta vie soit en unité. Ne dédie pas beaucoup de temps à cette brève oraison, à cette brève demande, parce qu’il te suffira d’interrompre un seul instant le cours de ta vie pour que, dans le contact avec ton intérieur, s’éclaircissent tes sentiments et tes idées.

Eloigner la contradiction de soi-même, c’est dépasser la haine, le ressentiment, le désir de vengeance. Eloigner la contradiction, c’est cultiver le désir de réconciliation avec d’autres et avec soi-même. Eloigner la contradiction, c’est pardonner et réparer deux fois tout mal que tu aurais pu infliger à d’autres. Ça, c’est l’attitude qu’il convient de cultiver. Alors, à mesure que le temps passe, tu comprendras que le plus important est d’atteindre une vie d’unité intérieure qui fructifiera quand ce que tu penses, ce que tu sens et ce que tu fais, ira dans la même direction. La vie croît par son unité intérieure et se désintègre par la contradiction. Et il se trouve que ce que tu fais ne reste pas seulement en toi mais parvient aussi aux autres. C’est pourquoi, quand tu aides les autres à dépasser la douleur et la souffrance, tu fais grandir ta vie et tu apportes au monde. Inversement, quand tu augmentes la souffrance des autres, tu désintègres ta vie et tu envenimes le monde. Et qui dois-tu aider ? D’abord, ceux qui sont les plus proches. Mais ton action ne s’arrêtera pas à eux.

Avec cette « recette », l’apprentissage ne s’achève pas mais c’est plutôt là qu’il commence. Dans cette « recette-là », il est dit qu’il faut demander. Mais à qui demande-t-on ? Selon ce que tu crois, ce sera soit à ton dieu intérieur, soit à ton guide, soit à une image inspiratrice et réconfortante. Enfin, si tu n’as personne à qui demander, tu n’auras personne non plus à qui donner et donc mon cadeau ne méritera pas d’être accepté.

Plus tard, tu pourras prendre en considération ce qu’explique le Message dans son Livre, dans son Chemin et dans son Expérience. Et tu compteras aussi sur de véritables compagnons qui pourront entamer avec toi une vie nouvelle.

Dans cette simple demande, il y a aussi une méditation orientée vers sa propre vie. Et avec le temps, cette demande et cette méditation prendront de la force au point de transformer les situations quotidiennes.

En avançant ainsi, un jour peut-être, tu capteras un signal. Un signal qui se présente quelquefois avec des erreurs et quelquefois avec des certitudes. Un signal qui s’insinue avec beaucoup de douceur, mais qui, en de rares moments de la vie, fait irruption comme un feu sacré, donnant lieu au ravissement des amoureux, à l’inspiration des artistes et à l’extase des mystiques. Parce qu’il convient de le dire, autant les religions que les oeuvres d’art et les grandes inspirations de la vie sortent de là, des diverses traductions de ce signal, et ce n’est pas pour autant qu’il faut croire que ces traductions représentent fidèlement le monde qu’elles traduisent. Ce signal dans ta conscience est la traduction en images de ce qui n’a pas d’image, c’est le contact avec le Profond du mental humain, une profondeur insondable où l’espace est infini et le temps éternel."
SILO, La Reja – 07 mai 2005

2016/06/08

La question de Dieu


(configurer sous titres en français)
Silo,
Rencontre pour un dialogue philosophico-religieux. 
Syndicat Luz y Fuerza, Buenos Aires, Argentine, 
29 octobre 1995
"Si Dieu n’est pas mort, les religions ont alors des responsabilités à assumer envers l’humanité. Elles ont aujourd’hui le devoir de créer un nouvel environnement psychosocial, de s’adresser à leurs fidèles avec une attitude pédagogique et d’éradiquer toute trace de fanatisme et de fondamentalisme. Elles ne peuvent rester indifférentes face à la faim, à l’ignorance, à la mauvaise foi et à la violence.
Elles doivent fermement contribuer à renforcer la tolérance et le dialogue avec d’autres confessions et avec tous ceux qui se sentent responsables du destin de l’humanité. Elles doivent s’ouvrir, et je vous prie de ne pas prendre ceci pour une irrévérence, aux manifestations de Dieu dans les différentes cultures. Nous espérons d’elles cette contribution à la cause commune en un moment par ailleurs difficile.
Au contraire, si Dieu est mort dans le cœur des religions, nous pouvons être certains qu’il renaîtra en une nouvelle demeure, comme nous l’enseigne l’histoire de l’origine de toutes les civilisations ; et cette nouvelle demeure sera dans le cœur de l’être humain, et elle sera fort éloignée de toute institution et de tout pouvoir"

(texte complete:)
"J’essaierai, dans les vingt minutes qui m’ont été accordées, de donner mon point de vue sur la première des questions de l’ordre du jour défini par les organisateurs de cet événement, à savoir La question de Dieu.
La question de Dieu peut être posée de différentes façons. Je choisirai le cadre historique-culturel, non par affinité personnelle, mais pour tenir compte du cadre implicite de cette rencontre. L’ordre du jour inclut en effet d’autres questions telles que “ la religiosité dans le monde contemporain ” et “ le dépassement de la violence personnelle et sociale ”. L’objet de cet exposé sera par conséquent “ la question de Dieu ”, et non “Dieu”.
Pourquoi devrions-nous nous intéresser à la question de Dieu ? Quel intérêt un tel sujet peut-il avoir pour nous qui appartenons déjà au XXIe siècle ? Ne l’avait-on pas considéré comme épuisé depuis l’affirmation de Nietzsche, “ Dieu est mort ” ? Apparemment, cette question n’a pas été réglée par simple décret philosophique. Et ceci pour deux raisons importantes : en premier lieu, on n’a pas compris exactement la signification d’une telle question ; en second lieu, nous nous rendons compte, à partir d’une perspective historique, que ce qui était considéré encore récemment comme “hors propos” soulève aujourd’hui de nouvelles questions. Et les interrogations sur ce sujet résonnent non dans les tours d’ivoire des penseurs ou des spécialistes, mais dans la rue et dans le cœur des gens simples. On pourra toujours dire que ce que l’on observe aujourd’hui est une simple croissance de la superstition ou un trait culturel de peuples qui, pour défendre leur identité, retournent avec fanatisme vers leurs livres sacrés et leurs leaders spirituels. Avec une approche pessimiste et en se fondant sur certaines interprétations historiques, on pourra aussi considérer que tout ceci signifie une régression vers d’obscures époques. A chacun son avis ; toutefois la question demeure, et c’est ce qui compte.
Je crois que l’affirmation de Nietzsche : “ Dieu est mort ” marque un moment décisif dans la longue histoire de la question de Dieu, du moins du point de vue d’une théologie négative ou “radicale”, comme voudront l’appeler les défenseurs de cette position.
Il est clair que Nietzsche ne se situait pas sur le terrain de la confrontation que les théistes, les athées, les spiritualistes ou les matérialistes fixaient habituellement pour leurs discussions. Nietzsche se demandait plutôt : croit-on encore en Dieu ? ou encore : le processus qui en finira avec la croyance en Dieu est-il déjà en marche ? Dans Ainsi parlait Zarathoustra, celui-ci dit : “ … Et c’est ainsi qu’ils se séparèrent l’un de l’autre, le vieillard et l’homme, riant comme rient deux petits garçons. Mais quand Zarathoustra fut seul, il parla ainsi à son cœur : “Serait-ce possible ! Ce vieux saint dans sa forêt n’a pas encore entendu dire que Dieu est mort !” ” Dans la IVe partie, Zarathoustra demande : “ Qu’est-ce que tout le monde sait aujourd’hui ? … Serait-ce ceci, que le Dieu ancien ne vit plus, le Dieu en qui tout le monde croyait jadis ? Tu l’as dit, répondit le vieillard attristé. Et j’ai servi le Dieu ancien jusqu’à sa dernière heure. ” D’autre part, dans Le gai savoir apparaît la parabole de l’insensé qui dit en cherchant Dieu sur la place publique : “ Où est allé Dieu ? … je veux vous le dire ! … Dieu est mort ! Dieu reste mort ! … ” Mais comme ceux qui l’écoutaient ne comprenaient pas, le fou leur expliqua qu’il était venu prématurément, et que la mort de Dieu était encore en train d’advenir.
Dans les passages cités, il est évident que l’on fait allusion à un processus culturel, au déplacement d’une croyance, en laissant de côté la détermination exacte de l’existence ou de la non-existence en soi de Dieu. Le déplacement de cette croyance a des conséquences considérables car elle entraîne tout un système de valeurs, du moins en Occident et à l’époque où Nietzsche écrit. La “ grande marée du nihilisme ”, prédite par l’auteur pour les temps à venir, a comme toile de fond la mort annoncée de Dieu.
Suivant cette conception, on peut penser que si les valeurs d’une époque sont fondées sur Dieu et que celui-ci disparaît, un nouveau système d’idées devra advenir, qui rendra compte de la totalité de l’existence et justifiera une nouvelle morale. Ce système d’idées devra rendre compte du monde, de l’histoire, de l’être humain et de leur signification, de la société et de la vie collective, de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, de ce que l’on doit faire et ne pas faire. Or, de telles idées sont apparues depuis bien longtemps et ont abouti aux grandes constructions de l’idéalisme critique et de l’idéalisme absolu. Peu importe dans quelle direction – idéaliste ou matérialiste – un tel système de pensée a été appliqué car sa trame et sa méthodologie de connaissance et d’action étaient strictement rationnelles et ne rendaient jamais compte de la totalité de la vie. Dans l’interprétation nietzschéenne, les choses étaient à l’opposé : les idéologies surgissaient de la vie pour en donner une explication et une justification. A ce propos, n’oublions pas que Nietzsche et Kierkegaard, tous deux en lutte contre le rationalisme et l’idéalisme de l’époque, passent pour être les précurseurs des philosophies de l’existence. Cependant, la description et la compréhension de la structure de la vie humaine n’apparaissent pas encore dans l’horizon philosophique de ces auteurs – elles arriveront à une époque ultérieure. A leur époque, la définition de l’homme en tant “qu’animal rationnel” agit encore de manière sous-jacente : l’homme en tant que nature dotée d’une “raison” qui peut être comprise en termes d’évolution animale ou en termes de “réflexe”, etc. A cette époque, on pouvait encore penser légitimement que la “raison” primait sur le reste ou, à l’inverse, que les instincts et les forces obscures de la vie orientaient la raison, comme chez Nietzsche et chez les vitalistes en général. Mais après la “découverte” de la “vie humaine”, les choses changèrent… Et je dois m’excuser de ne pas développer ce point en raison du temps qui m’est imparti pour cet exposé.
Cependant, j’aimerais éclaircir sommairement la sensation d’étrangeté que l’on éprouve lorsqu’on affirme que “la vie humaine” n’a été découverte et comprise que récemment. En deux mots : depuis les premiers hommes jusqu’à nos jours, nous savons tous que nous vivons, que nous sommes humains et tous, nous faisons l’expérience de notre propre vie ; néanmoins, dans le domaine des idées, la compréhension de la vie humaine avec sa structure typique et ses caractéristiques propres est très récente. C’est comme si l’on disait que nous, humains, avons toujours vécu avec les codes de l’ADN et de l’ARN dans nos cellules, mais qu’il y a fort peu de temps que ceux-ci ont été découverts et que leur fonctionnement a été compris ; ainsi, des concepts comme ceux d’intentionnalité, d’ouverture, d’historicité de la conscience, d’intersubjectivité, d’horizon, etc. ont été précisés récemment dans le domaine des idées ; et grâce à eux, on a rendu compte de la structure de la “vie humaine”, et non de la vie en général. La définition qui en résulte est radicalement différente de celle de “l’animal rationnel”. Par exemple : la vie animale, la vie naturelle, commence au moment de la conception ; mais la vie humaine, quand commence-t-elle si elle est par définition “être-au-monde”, et que “être au monde” est ouverture et milieu social ? Ou bien : la conscience est-elle le reflet des conditions naturelles et “objectives” ou est-elle l’intentionnalité qui configure et modifie les conditions données ? Ou encore : l’être humain est-il définitivement achevé ou est-il un être capable de se modifier et de se construire lui-même, non seulement dans un sens historique et social, mais aussi biologique ? Ainsi, les découvertes concernant la structure de la vie humaine soulèvent d’innombrables questions qui nous poussent à dépasser l’horizon historique de l’époque où Nietzsche a pu affirmer que “ Dieu est mort ! ”, époque où prévalait encore la définition de l’être humain comme “animal rationnel”.
Revenons à notre sujet…
Si, à la mort de Dieu, on ne trouvait aucun substitut qui pose les fondements du monde et de l’action humaine ou si, face à cette mort, on imposait de force un système rationnel auquel échapperait le fondamental (la vie), ce serait le chaos et l’effondrement des valeurs, qui entraînerait avec lui toute la civilisation. C’est ce que Nietzsche a nommé “ la grande marée du nihilisme ” et parfois “ l’Abîme ”. Il est clair que ni les études qu’il a menées dans La Généalogie de la morale, ni les idées qu’il a développées dans Par-delà le bien et le mal ne sont parvenues  à produire la “ transmutation des valeurs ” qu’il s’efforçait de rechercher. Au contraire, en cherchant quelque chose qui puisse dépasser son “dernier homme” du XIXe siècle, il construisit un Surhomme qui, comme dans les plus récentes légendes du Golem, se mit en marche sans contrôle, détruisant tout sur son passage. On érigea l’irrationalisme et la “ volonté de puissance ” en valeur suprême, constituant ainsi le tréfonds idéologique de l’une des plus grandes monstruosités dont se souvient l’Histoire.
Le “Dieu est mort” n’a pu être résolu ni dépassé par une base de valeurs nouvelle et positive. Et les grandes constructions de la pensée trouvèrent leur point d’orgue dans la première partie de ce siècle sans atteindre cet objectif. A l’heure actuelle, nous nous immobilisons face à ces questions : pourquoi devrions-nous être solidaires ? Pour quelle cause faudrait-il que nous risquions notre avenir ? Pourquoi devrions-nous lutter contre toutes sortes d’injustices ? Par simple nécessité, pour une raison historique ou à cause d’un ordre naturel ? L’ancienne morale basée sur Dieu, mais sans Dieu, est-elle ressentie comme une nécessité ? Tout cela est insuffisant !
Aujourd’hui, nous nous trouvons dans l’impossibilité historique que surgissent de nouveaux systèmes qui posent des fondements solides ; pourtant, la situation semble se compliquer. Nous devons rappeler que la dernière grande vision de la philosophie apparaît en 1900, dans les Recherches logiques de Husserl ; que la vision complète du psychisme humain, proposée par Freud dans L’interprétation des rêves, est de la même année ; la vision cosmique de la physique prend forme en 1905 et 1915 avec la relativité d’Einstein ; la systématisation de la logique, quant à elle, prend forme en 1910 dans les Principia Mathematica de Russel et Whitehead et en 1921, dans le Tractatus logico-philosophicus de Wittgenstein ; Etre et Temps de Heidegger date de 1927 et cette œuvre inachevée, qui prétendait jeter les bases d’une nouvelle ontologie phénoménologique, marque l’époque de rupture avec les grands systèmes de pensée.
Précisons que nous ne parlons pas de l’interruption de la pensée, mais de l’impossibilité de continuer à élaborer de grands systèmes capables d’apporter un fondement à toutes choses.
Le dynamisme de cette période se manifeste également dans le domaine esthétique, à travers “le grandiose” des œuvres. C’est Stravinsky, Bartok et Sibelius, Picasso, les muralistes Rivera, Orozco et Siqueiros ; ce sont des écrivains de grande ampleur comme Joyce, des cinéastes épiques comme Eisenstein, les constructeurs du Bauhaus avec Gropius à leur tête ; des urbanistes, des architectes tels Wright et Le Corbusier, aux œuvres spectaculaires. La production artistique se serait-elle arrêtée dans les années suivantes et encore à l’heure actuelle ? Je ne le crois pas. Cependant, elle prend un autre aspect, se module, se déconstruit, s’adapte aux moyens ; elle se réalise grâce à des équipes et des spécialistes, et utilise la technique à l’extrême.
Les régimes politiques sans âme qui, pendant ces périodes, s’imposent et donnent l’illusion du monolithisme et de la complétude, peuvent être compris comme les séquelles d’un romantisme délirant, comme des tentatives titanesques pour transformer le monde à n’importe quel prix. Ils inaugurent l’ère de la barbarie technicisée, de la suppression de millions d’êtres humains, de la terreur atomique, des bombes biologiques, de la contamination et de la destruction à grande échelle. Voilà la grande marée du nihilisme, celle qui annonçait la destruction de toutes les valeurs et la mort de Dieu de Zarathoustra ! En quoi l’être humain croit-il encore ? Croit-il en de nouvelles alternatives de vie ou bien se laisse-t-il emporter par un courant qui lui semble irrésistible et comme ne dépendant pas de son intention ?
C’est alors que s’installe fermement la prédominance de la technique sur la Science, la vision analytique du monde, la dictature de l’argent abstrait sur les réalités productives. Dans ce magma se ravivent les différences ethniques et culturelles que l’on croyait dépassées par le processus historique ; les systèmes sont rejetés par le déconstructivisme, le post-modernisme et les courants structuralistes. La frustration de la pensée devient un lieu commun chez des philosophes à l’intelligence faible.
Le méli-mélo des styles qui se supplantent les uns les autres, la déstructuration des relations humaines et la propagation de supercheries en tout genre rappellent les époques d’expansion impériale de la Perse ancienne, de l’hellénisme et de la Rome des Césars. Par cet exposé, je ne prétends pas présenter une morphologie historique type, un modèle de processus en spirale qui se nourrit d’analogies. En tout cas, je souligne des aspects qui ne nous surprennent pas et ne nous semblent pas incroyables car on les a observés, quoique dans un contexte différent de mondialisation et de progrès matériel. Je ne veux pas non plus transmettre l’atmosphère “d’inexorabilité” d’une séquence mécanique dans laquelle l’intention humaine ne compte pas. Je pense plutôt le contraire. Je crois que, grâce aux réflexions que suscite l’expérience historique de l’humanité, nous sommes aujourd’hui en mesure d’amorcer une nouvelle civilisation, la première civilisation planétaire. Mais les conditions requises pour ce saut sont extrêmement difficiles à remplir. Pensons à la manière dont s’élargit la brèche entre d’un côté les sociétés post-industrielles, les sociétés de l’information et de l’autre les sociétés où l’on souffre de la faim ; pensons à l’augmentation de la marginalisation et de la pauvreté dans les sociétés opulentes ; pensons à l’abîme entre les générations, qui semble freiner l’avancée de l’Histoire ; pensons à la dangereuse concentration du capital financier international, au terrorisme de masse, aux brusques sécessions, aux chocs ethnico-culturels, aux déséquilibres écologiques, à l’explosion démographique et aux mégalopoles au bord du collapsus… Pensons à tout ceci et, sans céder à une vision apocalyptique, il faudra bien admettre les difficultés que présente le scénario actuel.
Le problème se situe à mon avis dans cette difficile transition entre le monde que nous avons connu et le monde à venir. Et comme dans toutes les transitions entre la fin d’une civilisation et le début d’une autre, il faudra tenir compte de la possibilité d’un collapsus économique, d’une déstructuration administrative, d’un remplacement des Etats par des Para-Etats et par des bandes ; il faudra prendre garde au règne de l’injustice, au découragement, à l’amenuisement de l’être humain, à la dissolution des liens, à la solitude, à l’augmentation de la violence et à l’émergence de l’irrationalisme, tout cela dans un milieu de plus en plus accéléré et de plus en plus global. Par-dessus tout, il faudra examiner quelle sera la nouvelle image du monde à proposer : quel type de société, quel type d’économie, quelles valeurs, quel type de relations interpersonnelles, de dialogue entre chaque être humain et son prochain, entre chaque être humain et son âme
Néanmoins, toute proposition nouvelle devra tenir compte d’au moins deux limites : premièrement, aucun système complet de pensée ne pourra prendre pied dans une époque de déstructuration ; deuxièmement, aucune articulation rationnelle du discours ne sera défendable si elle va au delà des aspects immédiats de la vie pratique et de la technologie. Ces deux difficultés nuisent à la possibilité de fonder durablement de nouvelles valeurs.
Si Dieu n’est pas mort, les religions ont alors des responsabilités à assumer envers l’humanité. Elles ont aujourd’hui le devoir de créer un nouvel environnement psychosocial, de s’adresser à leurs fidèles avec une attitude pédagogique et d’éradiquer toute trace de fanatisme et de fondamentalisme. Elles ne peuvent rester indifférentes face à la faim, à l’ignorance, à la mauvaise foi et à la violence.
Elles doivent fermement contribuer à renforcer la tolérance et le dialogue avec d’autres confessions et avec tous ceux qui se sentent responsables du destin de l’humanité. Elles doivent s’ouvrir, et je vous prie de ne pas prendre ceci pour une irrévérence, aux manifestations de Dieu dans les différentes cultures. Nous espérons d’elles cette contribution à la cause commune en un moment par ailleurs difficile.
Au contraire, si Dieu est mort dans le cœur des religions, nous pouvons être certains qu’il renaîtra en une nouvelle demeure, comme nous l’enseigne l’histoire de l’origine de toutes les civilisations ; et cette nouvelle demeure sera dans le cœur de l’être humain, et elle sera fort éloignée de toute institution et de tout pouvoir.
Je vous remercie de votre attention."
——————-
*  Le terme registre constitue l’un des concepts centraux de la psychologie de Silo ; il signifie l’expérience vécue que l’on a d’un phénomène, c’est-à-dire la manière dont la conscience l’enregistre, “ l’impression ” du phénomène dans la conscience (n.d.t.).

2016/03/20

Le double énergétique, l’Esprit et l’Expérience

source: 
PRATIQUE D’ASCESE. L’OFFICE ET LA MANIFESTATION DE L’ESPRIT
Parcs d’Étude et de Réflexion La Belle Idée
Mars 2016
Michelle Salaméro
michellesalamero@yahoo.fr

Le double énergétique

Afin de mieux appréhender sa réalité, j’ai cherché des données complémentaires de ce que dit Silo sur le double énergétique et l’Esprit, et le travail d’Andres K. « Compilation partielle - Commentaires de Silo sur l’âme ou double et l’Esprit - Version 18 juin 2012 », m’a été d’un immense apport. J’y ferai souvent référence.
Donc, selon les commentaires de Silo, le double – appelé âme, par les anciens5 - est un champ d’énergie psychophysique qui 6:
- se structure en organisant la matière,
- circule dans et autour de tout être vivant,
- utilise le corps comme un centre de gravité,
- est actif dès la fécondation,
- et complète tous les organes du corps entre eux, même s’ils ne sont pas joints physiquement.

Champ énergétique, il se nourrit de « sensations de potentiels différents», ce que Silo appelle les impressions : ce qui se voit, s’entend, se sent, à travers les sens externes et internes, mais aussi les sentiments, les pensées, les sensations7, et donc tout ce qui provient de la mémoire. Et comme le corps physique en a aussi besoin pour fonctionner, il les reçoit par l’énergie du double, lui-même utilisant le corps comme centre de gravité. Tout ce que nous sentons, nous le sentons à travers le double8, cette énergie à la fois psychique et physique, que décrit Edouardo Gonzalo comme un "système d’exploitation informatique", interface qui communique avec le " hardware ".9
Donc, ce champ énergétique circule dans et autour de tout être vivant, et nous allons voir à plusieurs reprises que, pour devenir ce principe organisateur – ou " ordonnateur " - de la matière, Silo indique que le double doit retourner sur lui-même, se faire conscient.
Dans son apport « Références aux états de conscience inspirée chez Platon »10, Pia Figueroa mentionne des extraits du magnifique texte « Phèdre ou de la beauté », qui m’évoquent à la fois les " nourritures du double ", ce mouvement intérieur et " la conscience de soi " :
« … Car tout corps qui reçoit son mouvement de l'extérieur est inanimé ; mais celui qui le reçoit du dedans, de lui-même, est animé, puisque c'est en cela même que consiste la nature de l'âme ».
"… Il s'ensuit que la pensée d'un dieu qui se nourrit d'intellection et de connaissance sans mélange – et de même la pensée de toute âme qui se soucie de recevoir l'aliment qui lui convient -, se réjouit, lorsque, après un long moment, elle aperçoit la réalité, et que, dans cette contemplation de la vérité, elle trouve sa nourriture et son délice, jusqu'au moment où la révolution circulaire la ramène à son point de départ.»
Le double se nourrit de ces " sensations ", à travers l’accumulation de nos expériences vécues, mécaniques ou intentionnelles, à travers notre structure conscience-monde. Si nous prenons conscience de nos actes, par le fait de monter le niveau d’attention et de conscience de soi - le " retour sur soi ", la contemplation de Platon – ces sensations se modifient : elles gagnent en intensité. De fait, lorsque nos actes sont créateurs d’unité, cette unité se renforce. S’ils sont créateurs de contradiction, la contradiction se renforce. Et nous pouvons travailler pour dépasser - voire réparer - ces contradictions et nourrir alors le double de nouvelles sensations unitives. 8

L’action du double peut donc être mécanique, et s’il n’est pas animé par un Dessein, une conscience supérieure, il n’est autre qu’une sorte de conglomérat énergétique qui, sans support physique, se désintègrera11.
Éclaircie par ces données, et, vouant une curiosité ludique et poétique, à défaut d’être purement scientifique, au domaine de la physique (du modèle standard aux phénomènes quantiques), j’ai complété ces données et résumerai cette petite investigation jubilatoire ainsi :
Toute la matière de l'Univers, des molécules d'eau aux galaxies, en passant par les organismes vivants (et donc le corps humain), est formée de particules élémentaires qui " tiennent ensemble " par l'interaction des quatre forces physiques que sont la gravité, la force nucléaire forte, la force nucléaire faible et la force électromagnétique. Pour comprendre d’où provient leur masse (et donc leur " matière "), il a fallu découvrir ce que la communauté scientifique surnomme " la particule de Dieu ", le boson de Higgs, « clef de voûte de la structure fondamentale de la matière, qui donne leur masse à toutes les autres particules de notre univers. Sans le boson de Higgs, les particules ne se rencontreraient jamais, elles ne pourraient créer des protons et des neutrons, qui, combinés aux électrons, forment la matière »12. Il existe donc une particule sans masse qui, par le simple fait d’être en relation, donne leur masse aux autres particules.
Tout est énergie … et relation.
Ce début d’étude dans le domaine de la physique, et qui n’est pas le propos de cet écrit, m’a surtout permis de poser des bases d’observation, approfondissant ma question " les relations créent-elles, alors, la matière ? " et m’éloignant définitivement du piège de " la conscience magique ", admettant la possibilité de la réalité du double énergétique. Mais le lien entre la cérémonie de l’Office et la physique – standard et quantique - est un autre sujet …

L’Esprit et l’Expérience

« L’Esprit est, mais s’il n’y a pas l’expérience, c’est comme s’il n’existait pas. »13
L’être-humain naît-il l’Esprit - car l’Esprit « est » - mais il n’en a pas l’expérience ? Alors le Sens de sa vie serait notamment de le faire exister, d’aller vers ce que Silo appelle " la naissance spirituelle " ? C’est mon intuition, et, selon moi, c’est sans doute pourquoi il nous invite sans cesse à " l’expérience " :
« Ici, on parle de la révélation intérieure à laquelle parvient celui qui, soigneusement, médite en une humble recherche »14 ; « Au long des jours, je parvins à la lumière depuis les obscurités les plus épaisses, guidé non par l’enseignement mais par la méditation »15 ; « … Et tout ceci m’a donné à penser. Je me rends bien compte que sans ces expériences, je ne serais pas sorti du non-sens »16 ; « Sans l’expérience, tout est douteux, avec l’expérience de la Force, nous avons des évidences profondes. (…) Le contact avec la Force provoque une accélération et une augmentation de l’énergie psychophysique surtout si des actes cohérents sont réalisés quotidiennement, actes qui par ailleurs créent une unité intérieure orientée vers la naissance spirituelle. »17
Évidemment, le thème de la naissance m’a évoquée le plus Sacré de la vie. Imaginons le développement du foetus et la naissance de l’enfant comme le développement de l’Esprit et de la naissance spirituelle : l’Esprit " est ", au coeur de l’Etre-Humain, et il peut grandir jusqu’à sa naissance spirituelle au monde. Imaginons l’Etre Humain naissant avec ce " foetus-esprit " et, s’il lui donne les conditions pour se développer, alors, il peut le mettre au monde. Ainsi, Socrate pratiquait l’accouchement des âmes. La maïeutique, « méthode qui menait à la connaissance de soi-même et à la discipline des facultés de l’âme »18, revenait à leur faire se souvenir des connaissances qu’elles – les âmes - avaient avant d’entrer dans le corps. L’âme dont parle Socrate est le double décrit par Silo. L’âme se souvient, et ici, le thème du " retour du double sur lui-même " me semble lié à la Connaissance – que Socrate défend alors comme " objective " - par l’Expérience.
Silo décrit l’Esprit comme cette conscience non-psychophysique, qui est à la fois ce centre de gravité permanent et ce nouveau centre d’énergie organisée.
- Centre permanent car il est généré tout au long de la vie à travers l’action du double devenu conscient, par le travail avec la Force et l’accumulation d’actes unitifs.
- Nouveau centre d’énergie organisée car il possède des « propriétés énergétiques qui lui permettent de continuer son développement conscient vers des plans à chaque fois plus élevés »19 jusqu’à l’immortalité.

Ici, j’interprète que les propriétés énergétiques sont celles du double qui, en gagnant de plus en plus en unité, donne les conditions au développement de l’Esprit.
Ainsi, « L’Esprit est le principe nouveau de l’être humain, c’est une mutation de la conscience. Lorsque le double revient sur lui-même, il réfléchit et forme un centre d’énergie nouvelle capable d’irradier »20.
Pour que ce nouvel être humain naisse, nous avons donc besoin d’une expérience accomplie de l’Esprit, et nous sommes équipés pour cela. À nous de nous servir de cet équipement, avec attention et intention (direction, Dessein), pour que se forme cette conscience de soi, ce retour de l’énergie sur elle-même. Car « ceci est l’Esprit »21.
Je fais encore une petite parenthèse, inspirée de la théorie du physicien italien Massimo Teodorani sur l’intention et l’attention. Pour lui, ces deux principes observés en physique procèdent d’un processus de cohérence qui réduit le hasard des choses en les dirigeant vers une évolution précise ordonnée, diminuant l’entropie (la tendance naturelle à la désorganisation) et augmentant la néguentropie (facteur d'organisation) de systèmes physiques, sociaux et humains22. Ce qui me ramène au principe du double énergétique qui, pour organiser la matière, a besoin d’attention – la conscience de soi - et d’intention, la charge affective puissante du Dessein.

NOTES

5 Compilation partielle. Commentaires de Silo sur l’âme ou double et l’esprit - Version 18 juin - 2012 - Andres K – Communication de l’École (1973) p.10
6 Id. p. 8
7 Id. Extraits des Notes de l’École – p.80
8 Madeleine John - El Doble y el Espíritu - Entrevista a Eduardo Gozalo - http://www.parclabelleidee.fr/monographies.php
9 Id. p. 52
10 Pia Figueroa – Références aux états de conscience inspirée chez Platon – chapitre 3 - http://www.parclabelleidee.fr/monographies.php
11 Compilation partielle. Commentaires de Silo sur l’âme ou double et l’esprit - Version 18 juin - 2012 - Andres K – p.11
12 http://quoi.info/actualite-science/cest-quoi-le-boson-de-higgs-explication-1145540/
13 Compilation partielle. Commentaires de Silo sur l’âme ou double et l’esprit - Version 18 juin - 2012 - Andres K – Extraits des Notes de l’École – p.82
14 Le Message de Silo – Éditions Références 2010 – p.9
15 Id – p.13
16 Id – p.22
17 Commentaires du Message de Silo – Éditions Références 2010 – p.32
18 Mariana Uzielli – Antécédents de la Discipline de la Morphologie – Platon et le Pythagorisme - http://www.parclabelleidee.fr/monographies.php
19 Compilation partielle. Commentaires de Silo sur l’âme ou double et l’esprit - Version 18 juin - 2012 - Andres K – Le début de la deuxième ronde (1974) p. 20
20 Id. Notes de l’École – p.84

21 Id. Classeur Orange (1974) p. 19