2019/03/13

Le thème de Dieu

Intervention de Silo lors de la Rencontre pour un dialogue philosophico-religieux
Syndicat Luz y Fuerza, Buenos Aires, Argentine, 29 octobre 1995
Source: Silo Parle

J’essaierai, dans les vingt minutes qui m’ont été accordées, de donner mon point de vue sur le premier des sujets définis par les organisateurs de cet événement, à savoir Le thème de Dieu. La question de Dieu peut être posée de différentes façons. Je choisirai le cadre historico-culturel, non par affinité personnelle, mais pour tenir compte du cadre implicite de cette rencontre.

L’ordre du jour inclut en effet d’autres sujets tels que "la religiosité dans le monde contemporain" et "le dépassement de la violence personnelle et sociale". L’objet de cet exposé sera par conséquent "le thème de Dieu", et non "Dieu". 

Pourquoi devrions-nous nous intéresser à la question de Dieu ? Quel intérêt un tel sujet peut-il avoir pour nous qui appartenons déjà au XXIe siècle ? Ne l’avait-on pas considéré comme épuisé depuis l’affirmation de Nietzsche, « Dieu est mort » ? Apparemment, cette question n’a pas été réglée par simple décret philosophique. Et ceci pour deux raisonsimportantes: en premier lieu, on n’a pas compris exactement la signification d’une telle question ; en second lieu, à partir d’une perspective historique, nous constatons que ce qui était considéré encore récemment comme "hors propos" soulève aujourd’hui de nouvelles questions. Et les interrogations sur ce sujet résonnent non dans les tours d’ivoire des penseurs ou des spécialistes, mais dans la rue et dans le cœur des gens simples. On pourra toujours dire que ce que l’on observe aujourd’hui est une simple croissance de la superstition ou un trait culturel de peuples qui, pour défendre leur identité, retournent avec fanatisme vers leurs livres sacrés et leurs leaders spirituels. Avec une approche pessimiste et selon certaines interprétations historiques, on pourra toujours dire que tout ceci signifie un retour vers d’obscures époques. À chacun son avis ; toutefois la question demeure et c’est ce qui compte.

Je crois que l’affirmation de Nietzsche : « Dieu est mort » marque un moment décisif dans la longue histoire de la question de Dieu, du moins du point de vue d’une théologie négative ou "radicale", comme voudront l’appeler les défenseurs de cette position. Il est clair que Nietzsche ne se situait pas sur le terrain de la confrontation que les théistes et les athées, les spiritualistes et les matérialistes fixaient habituellement pour leurs discussions. Nietzsche se demandait plutôt : croit-on encore en Dieu ? Ou est-ce qu’un processus, qui mettra fin à la croyance en Dieu, est en marche ? Dans Ainsi parlait Zarathoustra, il dit : « Et c’est ainsi qu’ils se séparèrent l’un de l’autre, le vieillard et l’homme, riant comme rient les enfants. Mais quand Zarathoustra fut seul, il parla ainsi à son cœur : “Serait-ce possible ! Ce vieux saint dans sa forêt n’a pas encore entendu dire que Dieu est mort !” » Dans la IVe partie, Zarathoustra demande : « Qu’est-ce que tout le monde sait aujourd’hui? ... Que ne vit plus le Dieu ancien, ce Dieu en qui tout le monde croyait jadis ? Tu l’as dit, répondit le vieillard attristé. Et j’ai servi ce Dieu jusqu’à sa dernière heure. » D’autre part, dans Le gai savoir apparaît la parabole du dément qui dit en cherchant Dieu sur la place publique : « Je vous dirai où Dieu s’en est allé ! Dieu est mort ! Dieu reste mort ! » Mais comme ceux qui l’écoutaient ne comprenaient pas, le fou leur expliqua qu’il était venu prématurément, et que la mort de Dieu était encore en train d’advenir.

Dans les passages cités, il est évident qu’il est fait allusion à un processus culturel, au déplacement d’une croyance, en laissant de côté la détermination exacte de l’existence ou de la non-existence en soi de Dieu. Le déplacement de cette croyance a des conséquences énormes car elle entraîne tout un système de valeurs, du moins en Occident et à l’époque où Nietzsche écrit. En outre, la « grande marée du nihilisme », prédite par l’auteur pour les temps à venir, a comme toile de fond la mort annoncée de Dieu.

Suivant cette conception, on peut penser que si les valeurs d’une époque sont fondées sur Dieu et que celui-ci disparaît, devra advenir un nouveau système d’idées qui rende compte de la totalité de l’existence et justifie une nouvelle morale. Ce système d’idées devra rendre compte du monde, de l’histoire, de l’être humain et de leur signification, de la société et de la vie collective, du bien et du mal, de ce que l’on doit faire et de ce que l’on ne doit pas faire. Or, de telles idées sont apparues depuis bien long-temps et ont abouti aux grandes constructions de l’idéalisme critique et de l’idéalisme absolu. Dans ce cas, peu importe qu’un système de pensée ait été appliqué en direction idéaliste ou plus matérialiste car sa trame et sa méthodologie de connaissance et d’action étaient strictement rationnelles et ne rendaient jamais compte de la totalité de la vie. Dans l’interprétation nietzschéenne, les choses étaient à l’opposé : les idéologies surgissaient de la vie pour en donner une explication et une justification.

À ce propos, n’oublions pas que Nietzsche et Kierkegaard, tous deux en lutte contre le rationalisme et l’idéalisme de l’époque, passent pour être les précurseurs des philosophies de l’existence. Cependant, la description et la compréhension de la structure de la vie humaine n’apparaissent pas encore dans l’horizon philosophique de ces auteurs, situation à laquelle on arrivera à une époque ultérieure. C’est comme si agissait encore, de manière sous-jacente, la définition de l’homme en tant "qu’animal rationnel", en tant que nature dotée d’une raison et cette "raison" pouvait être comprise en termes d’évolution animale, en termes de "réflexe", etc. À cette époque, on pouvait encore penser légitimement que la "raison" était le plus important ou, à l’inverse, que les instincts et les forces obscures de la vie orientaient la raison, comme chez Nietzsche et chez les vitalistes en général.

Mais après la "découverte" de la "vie humaine", les choses changèrent... Et je dois m’excuser de ne pas développer ce point en raison du temps qui m’est imparti pour cet exposé. Cependant, j’aimerais éclaircir sommairement la sensation d’étrangeté que l’on éprouve lorsqu’on affirme que "la vie humaine" n’a été découverte et comprise que récemment. En deux mots : depuis les premiers hommes jusqu’à nos jours, nous savons tous que nous vivons, que nous sommes humains; tous, nous faisons l’expérience de notre propre vie ; néanmoins, dans le domaine des idées, la compréhension de la vie humaine avec sa structure typique et ses caractéristiques propres est très récente. C’est comme si l’on disait : nous, les humains, avons toujours vécu avec les codes de l’ADN et de l’ARN dans nos cellules, mais il y a fort peu de temps que ceux-ci ont été découverts et que leur fonctionnement a été compris. Ainsi, des concepts comme ceux d’intentionnalité, d’ouverture, d’historicité de la conscience, d’intersubjectivité, d’horizon, etc., ont été précisés récemment dans le domaine des idées ; et grâce à eux, on s'est rendu compte de la structure non pas de la vie en général mais de la "vie humaine". La définition qui en résulte est radicalement différente de celle de "l’animal rationnel". Par exemple : la vie animale, la vie naturelle, commence au moment de la conception ; mais la vie humaine, quand commence-t-elle si elle est par définition "être-au-monde", et que ceci signifie ouverture et milieu social ? Ou bien : la conscience est-elle le reflet des conditions naturelles et "objectives" ou est-elle l’intentionnalité qui configure et modifie les conditions objectives ? Ou encore : l’être humain est-il définitivement achevé ou est-il un être capable de se modifier et de se construire lui-même, non seulement dans un sens historique et social, mais aussi biologique ? Ainsi, par d'innombrables exemples des nouveaux questionnements que pose la découverte de la structure de la vie humaine, nous pourrions arriver à dépasser le cadre des questions qui furent soulevées à l'époque de « Dieu est mort ! », à l'intérieur de l'horizon historique dans lequel prévalait encore la définition de l’être humain comme "animal rationnel".

Revenons à notre sujet...

Si, à la mort de Dieu, on ne trouvait aucun substitut qui pose les fondements du monde et de l’activité humaine, ou bien si on imposait de force un système rationnel auquel échapperait le fondamental (c'est-à-dire la vie), ce serait le chaos et l’effondrement des valeurs, qui entraîneraient avec eux toute la civilisation. C’est ce que Nietzsche a nommé "la grande marée du nihilisme" et parfois "l’Abîme". Il est clair que ni les études qu’il a menées dans La Généalogie de la morale, ni les idées qu’il a développées dans Par-delà le bien et le mal ne sont parvenues à produire la "transmutation des valeurs" qu’il cherchait avec ardeur. Au contraire, en cherchant quelque chose qui puisse dépasser son "dernier homme" du XIXe siècle, il construisit un Surhomme qui, comme dans les plus récentes légendes du Golem, se mit en marche sans contrôle, détruisant tout sur son passage. On érigea l’irrationalisme et la "volonté de puissance" en valeur suprême, constituant ainsi le tréfonds idéologique de l’une des plus grandes monstruosités dont se souvient l’Histoire.

Le « Dieu est mort » n’a pu être résolu ni dépassé par une base de valeurs nouvelle et positive. Et les grandes constructions de la pensée se refermèrent dans la première partie de ce siècle sans atteindre cet objectif. À l’heure actuelle, nous nous trouvons immobilisés face à ces questions : pourquoi devrions-nous être solidaires ? Pour quelle cause devrions-nous risquer notre avenir ? Pourquoi devrions-nous lutter contre toute injustice ? Par simple nécessité, pour une raison historique ou à cause d’un ordre naturel ? L’ancienne morale basée sur Dieu, mais sans Dieu, serait-elle ressentie comme une nécessité ? Tout cela est insuffisant ! Et si aujourd’hui, nous nous trouvons dans l’impossibilité historique que surgissent de nouveaux systèmes qui posent des fondements solides, alors la situation semble se compliquer. 

Nous devons rappeler que la dernière grande vision de la philosophie apparaît en 1900, dans les Recherches logiques de Husserl de même que la vision complète du psychisme humain, proposée par Freud dans L’interprétation des rêves ; la vision cosmique de la physique prend forme en 1905 et 1915 avec la relativité d’Einstein ; la systématisation de la logique prend forme en 1910 dans les Principia Mathematica de Russel et de Whitehead en 1910, et dans le Tractatus logico-philosophicus de Wittgenstein en 1921 ; Être et Temps de Heidegger date de 1927 et cette œuvre inachevée, qui prétendait jeter les bases d’une nouvelle ontologie phénoménologique, marque l’époque de rupture avec les grands systèmes de pensée.

Ici, il faut souligner que nous ne parlons pas de l’interruption de la pensée, mais de l’impossibilité de continuer à élaborer de grands systèmes capables d’apporter un fondement à toutes choses. Le dynamisme de cette période se manifeste également dans le domaine esthétique, à travers "le grandiose" des œuvres. C’est Stravinsky, Bartok et Sibelius, Picasso, les muralistes Rivera, Orozco et Siqueiros ; les écrivains de grande ampleur comme Joyce, les cinéastes épiques comme Eisenstein, les constructeurs du Bauhaus avec Gropius à leur tête ; les urbanistes, les architectes spectaculaires Wright et Le Corbusier. La production artistique se serait-elle arrêtée dans les années suivantes et jusqu’à l’heure actuelle ? Je ne le crois pas. Cependant, elle prend un autre aspect, elle se module, se déconstruit, s’adapte aux moyens ; elle se réalise grâce à des équipes et des spécialistes, et devient technique à l’extrême.

Les régimes politiques sans âme qui, pendant ces périodes, s’imposent et donnent l’illusion du monolithisme et de la complétude, peuvent être compris comme les séquelles de romantismes délirants, comme des gigantismes de la transformation du monde à n’importe quel prix. Ils inaugurent l’ère de la barbarie technicisée, de la suppression de millions d’êtres humains, de la terreur atomique, des bombes biologiques, de la contamination et de la destruction à grande échelle. Voilà la grande marée du nihilisme qui annonçait la destruction de toutes les valeurs et la mort de Dieu de Zarathoustra !En quoi l’être humain croit-il encore ? Croit-il en de nouvelles alternatives de vie ou bien se laisse-t-il emporter par un courant qui lui semble irrépressible et qui ne dépend en rien de son intention ? C’est alors que s’installent fermement la prédominance de la technique sur la Science, la vision analytique du monde, la dictature de l’argent abstrait sur les réalités productives. Dans ce magma se ravivent les différences ethniques et culturelles que l’on croyait dépassées par le processus historique ; les systèmes sont rejetés par le déconstructivisme, le post-modernisme et les courants structuralistes. La frustration de la pensée devient un lieu commun chez des philosophes de la "faible intelligencia".  

Le méli-mélo des styles qui se supplantent les uns les autres, la déstructuration des relations humaines et la propagation de supercheries en tous genres rappellent les époques d’expansion impériale de la Perse ancienne, du processus hellénistique et de la Rome de César. Par cet exposé, je ne prétends pas présenter une morphologie historique type, un modèle de processus en spirale qui se nourrit d’analogies. En tout cas, je souligne des aspects qui ne nous surprennent pas et ne nous semblent pas incroyables car ils ont déjà émergé en d'autres temps, quoique dans un contexte  différent de mondialisation et de progrès matériel. Je ne veux pas non plus transmettre l’atmosphère "d’inexorabilité" d’une séquence mécanique dans laquelle l’intention humaine ne compte pas. Je pense plutôt le contraire. Je crois que, grâce aux réflexions que suscite l’expérience historique de l’humanité, nous sommes aujourd’hui en mesure d’amorcer une nouvelle civilisation, la première civilisation planétaire. Mais les conditions requises pour ce saut sont extrêmement difficiles à remplir.

Pensons à la manière dont s’élargit la brèche entre, d'un côté, les sociétés post-industrielles de l’information et, de l’autre, les sociétés affamées ; pensons à l’augmentation de la marginalisation et de la pauvreté à l'intérieur même des sociétés opulentes; pensons à l’abîme entre les générations, qui semble freiner l’avancée de l’Histoire ; pensons à la dangereuse concentration du capital financier international, au terrorisme de masse, aux brusques sécessions, aux chocs ethnico-culturels, aux déséquilibres écologiques, à l’explosion démographique et aux mégalopoles au bord du collapsus... Pensons à tout ceci et, sans céder à une vision apocalyptique, il faudra bien admettre les difficultés que présente le scénario actuel.

Le problème se situe à mon avis dans cette difficile transition entre le monde que nous avons connu et le monde à venir. Et comme dans toutes les transitions entre la fin d’une civilisation et le début d’une autre, il faudra prendre garde au possible collapsus économique, à la possibilité d’une déstructuration administrative, à la possibilité d’un remplacement des États par des para-États et par des bandes ; il faudra prendre garde au règne de l’injustice, au découragement, à l’amenuisement de l’être humain, à la dissolution des liens, à la solitude, à l’augmentation de la violence et à l’émergence de l’irrationalisme, tout cela dans un milieu de plus en plus accéléré et de plus en plus global. Pardessus tout, il faudra examiner quelle sera la nouvelle image du monde à proposer : quel type de société, quel type d’économie, quelles valeurs, quel type de relations interpersonnelles, de dialogue entre chaque être humain et son prochain, entre chaque être humain et son âme.

Néanmoins, toute proposition nouvelle devra tenir compte d’au moins deux impossibilités : premièrement, aucun système complet de pensée ne pourra s’établir dans une époque de déstructuration ; deuxièmement, aucune articulation rationnelle du discours ne pourra être défendue au-delà des aspects immédiats de la vie pratique et de la technologie. Ces deux difficultés nuisent à la possibilité de fonder durablement de nouvelles valeurs.

Si Dieu n’est pas mort, les religions ont alors des responsabilités à assumer envers l’humanité. Elles ont aujourd’hui le devoir de créer une nouvelle atmosphère psychosociale, de s’adresser à leurs fidèles avec une attitude pédagogique et d’éradiquer toute trace de fanatisme et de fondamentalisme. Elles ne peuvent rester indifférentes face à la faim, à l’ignorance, à la mauvaise foi et à la violence. Elles doivent fermement contribuer à renforcer la tolérance, aller plus loin même que la tolérance et développer une aptitude au dialogue avec d’autres confessions et avec tous ceux qui se sentent responsables du destin de l’humanité. Elles doivent s’ouvrir, et je vous prie de ne pas prendre ceci pour une irrévérence, aux manifestations de Dieu dans les différentes cultures. Nous espérons d’elles cette contribution à la cause commune en un moment par ailleurs difficile.

Au contraire, si Dieu est mort dans le cœur des religions, nous pouvons être certains qu’il renaîtra en une nouvelle demeure, comme nous l’enseigne l’histoire de l’origine de toutes les civilisations ; et cette nouvelle demeure sera dans le cœur de l’être humain, et elle sera fort éloignée de toute institution et de tout pouvoir.

Je vous remercie de votre attention.

2019/01/25

Mani et la beauté: Conséquences sur le moment actuel

  Parc d’Étude et de Réflexion La Belle Idée
Avril 2013

"Nous vivons dans un monde où l’accélération des changements produit un grand déséquilibre chez l’être humain. Un style de vie nous a été imposé selon lequel seule compte l’accumulation d’objets et de pouvoir. Les modèles et les références sociales actuelles ne valorisent pas la Connaissance et le progrès humain. Tout ce qui concerne la beauté réelle, c’est-à-dire l’inspiration, la poésie, l’amour de la nature et le monde intérieur, est soit écarté, soit considéré comme une marchandise ou un loisir. Puisque rien ne compte de ce qui est profond et beau, il n’y a plus de soin pour les belles choses, ni pour les relations amicales et amoureuses, qui demandent pourtant tellement d’attention à ce qui nous parvient de l’intérieur !

Nous avons beaucoup d’incertitudes quant à l’avenir. Ce modèle est en train d’exploser et c’est quelquefois inquiétant de constater que cette folie pourrait pour la première fois produire une des-truction de l’humanité, qui a créé par son esprit obscur, les armes nucléaires, psychologiques, fi-nancières et chimiques suffisantes pour le faire.

Je sens beaucoup d’amertume, et heureusement aussi une sainte révolte, gagner ceux qui ont des guides ! Tout n’est pas perdu puisque simultanément une nouvelle sensibilité surgit de ce dégoût. Nous sommes comme Mani "étrangers à ce monde". Mais nous ne savons pas trop comment faire.

Dans ces moments (un peu désespérés) de l’histoire, écoutons les faibles signaux qui peuvent nous aider à faire dévier la direction des événements. Pour cela, la connaissance est essentielle et il est important d’aller chercher dans le passé et dans ce moment présent, les personnes courageuses. Elles se reconnaissent au fait qu’elles ont été persécutées et effacées des mémoires par ceux qui prétendent aujourd’hui détenir la "vérité".

Mani fut à un moment de ma vie, et pendant ces deux dernières années, un compagnon dans mes joies et mes difficultés. Il me conseillait et je l’aimais. Il était comme le miroir où se projettent les guides, les bonnes personnes qui dans l’histoire apportent compréhension, protection, soulage-ment, enthousiasme…

Mani et "les rédempteurs" nous rappellent ce que nous avons oublié :

J’ai quelque chose de très spécial en moi qui fait que je suis un être humain, entre monde na-turel et monde divin. Je peux décider de ce que je ferai demain, changer ma propre nature, changer le monde… D’où vient cette capacité extraordinaire qu’on appelle intention ? Je peux vivre indifférent aux autres, je peux souffrir parce que l’autre souffre… D’où vient cette sensi-bilité qui s’appelle empathie, amour ou compassion ? Moi, humain, je suis le seul, je crois, à pouvoir observer une fleur, la trouver parfaite dans sa forme et sa couleur, la mémoriser et la dessiner… D’où vient cette capacité extraordinaire ?

Mani nous répond et nous explique comment procéder pour séparer lumière et obscurité.

Aujourd’hui, Silo nous dit :

Mais malgré tout... malgré tout... malgré cet enfermement affligeant, quelque chose de léger comme un son lointain, quelque chose de léger comme une brise de l’aube, quelque chose, qui commence doucement, se fraie un chemin à l’intérieur de l´être humain...

Pour quoi, ô mon âme, cette espérance ? Pour quoi cette espérance, qui depuis les heures les plus obscures de mon infortune, se fraie un passage en répandant sa lumière ?...

Dans certains moments de l’histoire s’élève une clameur, une demande déchirante des individus et des peuples. Alors, depuis le Profond parvient un signal. Souhaitons que ce signal soit traduit avec bonté par les temps qui courent ! Qu’il soit traduit en vue de dépasser la douleur et la souffrance ! Car derrière ce signal soufflent les vents du grand changement.

Dans les moments où cela est nécessaire, ils sont descendus à nouveau, les anges et les messagers, pour nous rappeler à notre propre nature qui est double. Nous avons "oublié" aujourd’hui la moitié de nous-mêmes : notre double, notre âme. C’est elle qui souffre dans ce monde, c'est elle que nous nourrissons par la bonne Connaissance, c'est elle qui, lorsqu'elle est nourrie, nous donne la sensation de liberté, de joie et de douceur…"

2019/01/21

Antenne psychique

Antenne psychique
En 2019, au pied de l'Aconcagua - où Silo a donné son message au monde - nous lancerons un signal, sous forme d’antenne parabolique, une demande pour l'humanité en faveur du dépassement de la douleur et la souffrance.

Nous proposons de laisser une empreinte, en nous connectant avec un espace interne de silence, pour construire une image lumineuse de l'avenir humain. Nous vous invitons à produire un objet en argile, dans lequel s'exprime cette image intériorisée du futur souhaité. Nous espérons que nous recevrons du monde entier des objets et des demandes écrites avec les aspirations les plus profondes.

Nous assemblerons toutes les pièces sur une antenne parabolique et cuirons ces pièces d'argile qui seront des demandes pour le futur. Cette construction collective, cette demande commune, restera comme une offrande au mont Aconcagua. 

Quoi ? 

Projet de collaboration internationale dans lequel nous proposons de traduire en argile, en papier ou en bois, une demande pour l'avenir de l'humanité. Ces demandes seront reçues à Punta de Vacas (Mendoza, Argentine) et le processus se terminera par une cuisson extérieure sur une antenne parabolique au pied de l'Aconcagua. 

Comment ? 

Nous chercherons une disposition intérieure, en réalisant les pièces à partir du silence intérieur et en visualisant cet avenir positif pour l'humanité. 

Dans quel but ? 

Pour envoyer une demande vers le futur. C'est une opportunité de syntonie entre les personnes qui aspirent à dépasser la douleur et la souffrance. Nous croyons que nos pensées, nos émotions et nos demandes ont un impact réel sur la réalité que nous construisons. 

Qui ? 

Les personnes du monde entier sont invitées à participer en envoyant leur demande (écrite ou une pièce réalisée par soi-même ou en groupe). 

Quand et où ? 

L'activité se déroulera jusqu'au 21 mars 2019, date à laquelle la cuisson des pièces aura lieu. 
Simultanément, dans différents endroits de la planète, les pièces seront produites individuellement ou en groupes. Nous ouvrons la proposition que cela se fasse au moment et à l'endroit que chacun décide : sur une place, dans une maison, avec des amis, avec la famille, une communauté, des institutions, etc. 

Instructions 

1 - Prendre un morceau d'argile (que vous aurez recueillie ou achetée). Si possible, ajouter du chamote ou de la brique moulue de 20%. Ou directement de l'argile pour Raku. 

2 - Détendre son corps, son cœur et son mental. 

3- Méditer ou réfléchir sur les questions suivantes : Qu'est-ce que je demande pour l'humanité dans le futur ? Quel avenir positif j'imagine pour l'humanité ? Comment j'imagine cette humanité du futur ? Comment je veux que ces gens se sentent ? Comment sera leur conscience ? Comment penseront-ils ? Seront-ils plus sages ? Plus gentils ? De plus grande bonté ? Attendre la réponse en silence. 

4 - Essayer de se connecter avec ses images intérieures pour les concrétiser dans l'argile. Nous ne mettons pas l'accent sur le résultat, mais sur l'attitude intérieure. Il n'y a pas de bonne réponse. Se laisser aller, il ne s'agit pas de faire bien ou mal. 

5 – « Vous qui marchez sur la terre, vous qui êtes l'argile du cosmos, laissez votre empreinte. » Essayer de faire une pièce pas plus grande que 12x12x12cm. 

6 - Laisser sécher. (Si vous êtes en contact avec un céramiste, organisez une cuisson de vos pièces. Sinon laissez-les simplement sécher.) 

7 - Pour faire parvenir les pièces, vous pouvez les conserver dans une boîte emballée dans du papier journal ou nous contacter à www.facebook.com/antenapsiquica

2018/10/08

Trouver un nouveau sens à la mort peut transformer la vie


Pressenza, 23.07.2018 Cloty Rubio
Cet article est aussi disponible en: EspagnolCatalan
Trouver un nouveau sens à la mort peut transformer la vie
Entretien avec Victor Piccininni, auteur du livre L’art d’accompagner. Outils et pratiques d’accompagnement personnel et spirituel en soins palliatifs
Victor, de quoi s’agit-il et quel est le but du livre ?
L’art d’accompagner est un petit guide pour aider dans la mission d’accompagner les personnes qui sont dans des moments critiques de leur vie, et plus spécifiquement, pour accompagner les personnes à la fin de leur vie physique. Il s’agit d’un bref écrit, destiné à tous. Une écriture qui n’a pas de grands développements, bien au contraire. Il s’agit d’un guide qui, d’une manière simple, essaie de transmettre une série d’outils, de pratiques et de suggestions utiles pour ces moments.
Quand l’on se trouve dans ces moments, que ce soit en tant qu’ami, en tant que membre de la famille ou comme professionnel, l’on se demande souvent ce qui est le plus approprié à faire, quoi dire, ce qu’il ne faut pas dire, quels exercices pourraient aider… Comment aider la personne à ressentir le plus grand bien-être possible, comment faire pour qu’elle parte de ce monde en paix. Comment accompagner tous ces moments.
Comment donner un nouveau sens à la vie en resignifiant la mort ?
Lorsque, à partir de sa propre expérience, on commence à avoir l’intuition, à soupçonner ou à être certain que la mort physique n’est que la fin de l’existence du corps, mais qu’il y a « quelque chose » qui peut être appelé de mille façons différentes : l’âme, l’esprit, la force intérieure ou cosmique, le profond, etc, et qui peut transcender cet instant et ouvrir la voie à l’immortalité, ouvrir la voie à d’autres temps et espaces différents de l’habituel, lorsque cela se produit, la vie elle-même prend un sens totalement différent de celui que l’on voit habituellement et l’on commence à agir d’une manière différente. Et si cette croyance ou intuition devient une certitude, si elle devient une expérience, la vie est transformée et les actions commencent à être guidées par ce nouveau sens de vie.
C’est pourquoi les expériences dans ce domaine sont si importantes, et non pas tant les théories. Les théories sans l’expérience nous laissent toujours dans le doute. Mais des expériences intérieures sur la possibilité d’une transcendance spirituelle, aussi minimes soit-elles, peuvent ouvrir le futur à un nouveau destin. Quand cette expérience sur le sens réel du moment de la mort devient évidente, la vie est redimensionnée, totalement resignifiée. Quand on a la certitude, par expérience, que la mort n’arrête que la partie physique et qu’il y a une possibilité que, s’il y a unité et réconciliation interne, quelque chose de sacré continuera son chemin évolutif, tout est profondément transformé.
Par conséquent, resignifier le moment de la mort peut conduire à transformer beaucoup de choses dans la vie. Beaucoup de gens en ont déjà fait l’expérience : quand un être cher meurt, ou quand, pour différentes circonstances, l’être cher a été dans un moment proche de la mort ou quand tu penses à ta propre finitude. Dans toutes ces situations, si tu y réfléchis, tu obtiens une resignification de ce qu’il faut faire dans la vie. Imagine-toi quand tu as l’expérience et la certitude que quelque chose continue après la mort !
Accompagner et aider les autres dans ce moment de la vie, avec affection et dévouement sincère, est vécu comme une grande action qui laisse un goût d’unité intérieure, ne le penses-tu pas ?
Oui, tout à fait. Et cette unité intérieure, cette sensation d’unité intérieure, est déjà en soi une expérience transcendante, une expérience qui t’ouvre d’autres portes intérieures et t’éloigne de la simple matérialité, de croire que tout se termine avec la mort.
Cet accompagnement commence à te connecter avec d’autres réalités plus profondes. Et tu sens que ces réalités profondes sont exactement les mêmes en toi et dans la personne que tu accompagnes. Et quand cela se produit, toutes les barrières imposées par les corps physiques sont surmontées et l’expérience d’une communication mentale, émotionnelle et spirituelle profonde s’ouvre.
Le livre n’est pas à but lucratif et cette première édition cherche à récolter des fonds pour une autre. Un millier d’exemplaires seront distribués dans les centres de soins palliatifs. Comment cette initiative a-t-elle vu le jour ?
L’objectif est d’amener ces outils et ces pratiques profondes là où ils sont le plus nécessaires. Je sens que ma formation autour des enseignements de Silo ne peut pas rester seulement en moi ou dans un petit groupe de personnes. C’est le but principal de ma vie et je pense que c’est la même chose avec des milliers de personnes qui ont été formées à cet enseignement. Nous essayons toujours d’apporter aux autres ce qui a été bon pour nous.
Ce livret a le même objectif et donc l’intérêt de multiplier les éditions et d’atteindre des milliers de centres de soins palliatifs et d’autres espaces où les gens en ont besoin. Je ne peux pas imaginer tirer profit de l’irradiation de cet enseignement, ce serait une contradiction. Pour cette raison, tout l’argent qui sera récolté avec cette première édition sera destiné à une deuxième édition et ainsi de suite, en améliorant et en élargissant le contenu, jusqu’à arriver le plus loin possible.
Faut-il aussi humaniser les derniers instants de ce monde ? Est-ce que ce besoin est évident ?
Je pense que nous devons « humaniser la santé » dans toute son ampleur et plus particulièrement dans les dernières étapes de la vie physique. L’accompagnement personnel, psychologique et spirituel en fin de vie fait partie de ce concept : Humaniser la santé. Nous ne sommes pas seulement un corps qui, lorsqu’il se détériore, tout se termine. C’est une conception purement matérialiste et anti-humaniste.
L’être humain est beaucoup plus que le corps, beaucoup plus qu’un nombre statistique, ou encore une position culturelle ou économique. Chaque fois, nous ressentons de plus en plus fortement le besoin de prêter attention à ce qui nous est interne et à ce qui est spirituel, à ce que chacun de nous ressent. Bien que souvent, nous ne savons pas comment exprimer ou canaliser ce besoin, mais ce besoin devient de plus en plus évident.
Les gens ont-ils des outils pour faire face à cette étape de la vie et à cet accompagnement ?
Je pense que oui. Aucune connaissance ou outil spécial n’est nécessaire pour commencer. Le livre en parle. Le plus important est l’attitude avec laquelle chacun aborde ces situations qui se donnent pour accompagner les autres. La première étape consiste à chercher à aller plus profondément en soi-même, à se connecter avec ce qu’il y a de meilleur en soi, avec cette bonté et cette compassion qui font partie de soi-même, qui sont dans soi-même… Et de là, nous allons vers l’autre que nous voulons accompagner. Ne pas le faire mécaniquement mû par le devoir ou par des intérêts particuliers. Les outils arrivent alors si l’attitude est adéquate, les outils se cherchent et se trouvent.
Qu’en est-il des professionnels, ont-ils un guide pour les aider dans les soins palliatifs ?
C’est une époque de grand développement et de progrès dans le domaine des soins palliatifs. Il répond à ce que nous disions au sujet du besoin profond d’humaniser la santé. Tout comme le développement du mercantilisme et le pouvoir de l’argent dans le domaine de la santé mènent à la déshumanisation de la pratique médicale, il y a une force croissante dans la direction opposée, dans la direction d’une humanisation croissante. Dans le sens d’assister et d’accompagner l’être humain comme un être intégral, avec le corps, l’esprit, les émotions, l’énergie… Cela signifie que les professionnels ont les outils pour s’occuper de ce concept intégral physique-psychique-spirituel. Bien sûr, cela dépendra des intérêts particuliers de chacun, de tenir compte ou non de ce dont nous parlons. De chercher et les appliquer ou se laisser emporter par le mercantilisme dominant.
En référence à ce point, mon expérience dans les unités de soins palliatifs (USP) est très gratifiante à cet égard. Les professionnels que j’ai rencontrés dans plusieurs USP ont une sensibilité très développée et ils ont aussi cette approche de soins intégraux pour la personne. Il y a beaucoup de connaissances, il y a des guides, des écrits et des expériences qui s’accumulent. C’est peut-être dans le domaine de l’accompagnement spirituel qu’il y a le plus grand manque d’outils et de guides, puisque le spirituel a souvent été associé au dogmatique ou religieux, ce qui conduit souvent à des malentendus. C’est pourquoi je suis intéressé par la publication de ce livret, qui se veut une contribution au domaine des pratiques personnelles et spirituelles, indépendantes ou complémentaires des croyances religieuses de chacun.
L’art d’accompagner propose un voyage à travers sa propre vie destiné à une réconciliation profonde avec soi-même et avec les autres : quelle est l’importance d’une réconciliation profonde ?
La réconciliation profonde avec soi-même et avec les autres conduit à l’unité intérieure, et au dépassement des ressentiments, contradictions et frustrations que tant de souffrances intérieures génèrent. Cette unité intérieure est la base de la croissance et du renforcement spirituel, et ce renforcement spirituel est synonyme de paix intérieure, de transformation, de joie douce au moment du départ, au moment de la mort physique et il est aussi synonyme de la possibilité de transcender ce moment dans d’autres temps et espaces. Ce n’est pas une théorie. Ces commentaires et affirmations sont basés sur l’expérience, sur ce que les gens ressentent et expérimentent quand ces réconciliations profondes deviennent réalité à l’intérieur de la personne.
Vous êtes membre de l’équipe de bénévoles de l’Unité de soins palliatifs de l’hôpital Dr. E. Tornú, comment se passe cette expérience ? Est-ce que tu le recommanderais à d’autres ?
Accompagner d’autres personnes dans les moments significatifs de leur vie, si tu le fais avec affection et en pensant à ce qu’il y a de mieux pour les autres, est une tâche merveilleuse. Et si tu as aussi les bons outils et les bonnes recommandations, tu aides les autres et tu t’aides toi-même. Cette tâche est comme une magie, parce que tu ressens la gratitude de l’autre personne. Tu sens que ce que tu fais l’aide vraiment à traverser cette situation et, de plus, cela s’inscrit en toi comme quelque chose de très valable, unitive et transformatrice. C’est quelque chose qui se répercute et au-delà de la situation difficile qui est vécue du point de vue physique, tu sens qu’une atmosphère de grande bonté inonde l’environnement. Mais comme il s’agit d’expériences personnelles, tout le monde ne se sent pas toujours à l’aise de faire cela.
Je crois fermement, que nous avons tous la capacité d’accompagner et d’aider les autres, mais chacun doit le faire là où il se sent à l’aise. Certains le feront en soins palliatifs, d’autres par l’éducation, d’autres par la transmission d’un enseignement de solidarité… Et ainsi d’autres dans tant d’autres activités qui rayonnent le meilleur de chacun. Toutes ces choses qui, d’une manière ou d’une autre, traduisent en actions concrètes ce que Silo a synthétisé de façon magistrale comme le moment de « Connecter avec le profond. Avec le sacré de l’intériorité humaine » et en même temps il nous a dit : « Il est temps d’Humaniser la Terre ! »

2018/09/17

Dario Ergas: Synthèse de l’étude sur la foi

Dario Ergas, Centre d’Études, Parc d’Études et de Réflexion Punta de Vacas, Mars 2017
Traduction en français par Nathalie Douay et Paquita Ortiz

Foi externe
La foi externe est un état psychologique dans lequel on attribue la cause de la force intérieure à un objet de conscience, externe ou interne. La conscience attribue sa cohésion à un objet et renforce  un de ses contenus. La foi externe s’expérimente comme une force intérieure mais qui appartient à l’objet de foi et que c’est lui qui nous la procure. C’est-à-dire que la foi est externe quand on croit que l’objet de foi est la cause de la foi.
La foi externe n’évite pas la peur, au contraire, elle l’augmente dans la coprésence. À chaque crise vitale, elle ressurgira en angoissant la conscience. Pour éviter que la peur ne s’empare de moi, je la submerge de prières ou de tout autre type de répétitions qui maintiennent mon attention en dépendance de l’objet de foi. Mais en faisant cela, en forçant l’attention pour maintenir en présence l’objet de foi, la peur grandit comme un tréfonds de la conscience.

Foi interne
La foi interne est un acte intentionnel, c’est-à-dire que l’acte a sa propre liberté et oriente le psychisme vers ce que l’on aime. La foi interne est, plus précisément, la sensation cénesthésique de cet acte intentionnel qui dirige le psychisme vers quelque chose de "voulu". Nous sommes face à  une qualité assez différente de ce que nous avons l’habitude d’appeler foi, qui en général, se réfère à la foi externe. La foi interne n’est pas un don, ni une grâce mais une énergie vitale que je peux expérimenter et dont je peux disposer pour "charger" des images mentales déterminées et orienter l’action dans une direction voulue.
Cette chose "voulue par moi", dans le cas de la foi interne, renforce l’acte qui la cherche, concentre la force intérieure qui l’imagine, privilégie la commotion interne et non sa "réalité" matérielle ou spirituelle, pas plus que sa possession ou sa concrétisation. La foi interne ne cherche pas à valider l’objet de foi mais à s’expérimenter elle-même en gagnant chaque fois plus en indépendance, autonomie ou liberté vis-à-vis du ou des objets auxquels elle se réfère.
L’acte de foi se réfère à "l’autre", qui est hors de mon contrôle et indépendant de ma volonté. Ce que je veux, "l’autre", n’est pas quelque chose qui "est" puisque son être s’échappe chaque fois que je le définis ; il s’agit de quelque chose qui a une qualité de processus, de changement ; ce que je veux avance en se montrant, en se dévoilant, en se construisant.
La foi interne est un acte intentionnel, comme réponse à une nécessité expérimentée comme vitale, de vie ou de mort, ou en d’autres termes, comme une nécessité de futur et de sens. La foi interne ne se réveille pas par pression sociale, ni par éducation, ni même par révélation. Dans tous ces cas, nous ne parvenons qu’à une foi externe qui porte dans ses racines, un certain degré d’imposition, plus ou moins subtil ou grossier. Ce qui est voulu depuis ma foi interne, au lieu de générer de la dépendance ou l’angoisse de la possession, fait rebondir le regard vers l’intériorité et j’expérimente la
reconnaissance de ma propre foi ou de la force interne. 
La foi en soi-même n’est pas affirmation de soi. Elle n’est pas l’exaltation de mes qualités. Elle n’est pas de s’accrocher à une croyance ou à une identité. La foi en soi-même jaillit quand je lâche les amarres de mon identité et que j’accepte que je ne sais pas qui je suis ; alors, à tâtons dans la quiétude de cette nuit d’étoiles immobiles, je sens l’impulsion de ma propre intention. Ce que je suis, "cet autre", ne m’appartient pas et pourtant réside en moi.
Ainsi, la foi interne est une intention de laquelle j’ai une sensation, qui dirige la conscience vers l’autre qui "veut par soi-même" sans que le moi puisse intervenir dans sa décision, et en le faisant,mon intention à son tour s’expérimente elle-même comme une augmentation de la foi interne, comme une reconnaissance de soi et comme la possibilité ouverte au futur.

Foi en la transcendance
Une foi externe dans la transcendance transférera l’expérience ou la possibilité de l’immortel, la volonté de Dieu, d’un autre être spirituel, ou à tout autre type de contenu de conscience. La peur de la mort est toujours coprésente et, dans certaines circonstances, très banales pour d’autres, elle traverse le brouillard qui m’assoupit et pénètre dans la peau tremblante de mon existence. Depuis la foi externe, j’aurai recours à un Être qui est l’objet de ma foi. Je l’invoquerai et je sentirai sa présence, et avec lui j’empêcherai que la peur de la mort sorte de la coprésence, expérimentant ainsi une certaine tranquillité. Par des prières et des répétitions, je forcerai la présence de cet Être, parce qu’en étant occupé à l’invoquer, l’angoisse de la mort diminue. La mort reste hors de l’horizon de mon attention mais perdure dans le champ de la coprésence. Au lieu de diminuer, la peur de la mort augmente sa pression comme réaction à la force que je mets pour empêcher qu’elle entre dans le champ de mon attention. Dans toute erreur ou toute crise, la peur de la mort surgira depuis la coprésence et occupera le centre de la conscience.
Ce n’est pas l’objet de l’acte de foi qui distingue la foi interne de la foi externe. Mais dans un cas, la direction de la conscience est mise vers le contact avec la force intérieure en se détachant de l’objet de foi, en le comprenant comme un échafaudage de la construction spirituelle remplaçable à chaque pas évolutif ; et dans le second cas, dans le cas de la foi externe, on affirme et on exalte l’objet de foi en le considérant comme la cause de la foi. Dans tous les cas, il faut clarifier que même dans le cas de la foi externe, si nous sommes face à une nécessité réelle, qui mobilise des forces instinctives de survie, un déplacement du moi habituel pourrait se produire. La conscience répondra depuis cette condition "inspirée" à la nécessité qui l’a pressionnée. Ceci validera l’objet de la foi externe et renforcera le sentiment que la force intérieure provient de l’extériorité.
Si au contraire, je réveille ma foi interne, j’accepte l'incertitude de ne pas connaître les réponses. Je me laisse posséder par le sentiment de l’ignorance face à des thèmes que jusqu’ici, j’essayais qu’ils ne m’affectent pas, de les chasser rapidement à travers une foi ingénue ; ou parfois, en éradiquant ces pensées par des oraisons ou des répétitions forcées. Absorbé par le doute et l’ignorance, un vertige inhabituel, une angoisse qui m’inquiète et qui reste pour toujours me révèlent que je suis face à une véritable nécessité de mon existence. Alors j’ai recours à ma foi interne.
Renversé vers l’intérieur de moi-même, je me réfugie au-delà de la sensation. Bien qu’il me coûte de l’accepter parce que ça réfute toute pensée antérieure, je sens une force intérieure qui ne s’altère pas face à la confusion intellectuelle, une certaine neutralité émotive qui ne s’agite pas dans le va-etvient du oui et du non de l’angoisse ; je trouve une tranquillité inespérée en moi, que je peux décider d’accepter, ou de le dégrader comme s’il était illusoire. La foi interne s’expérimente en soi-même, et même sans avoir de réponses, je sais que je "sais" et bien que ce soit sans passion, c’est sans peur non plus. Cette présence en moi, même au coeur de la tourmente, est révélatrice d’une force intérieure qui peut m’orienter dans une direction transcendante et de sens. La foi interne ne nie pas l’abîme, la mort ou le néant ; mais elle expérimente en elle-même quelque chose qui lui survit.

La croissance de la foi interne
Nous ne nous apercevons jamais assez de la primauté de l’action pour donner cohérence et unité à la vie. La pensée est importante, le sentiment est important mais leur mobilité et variabilité ne donnent pas consistance jusqu’à ce qu’ils soient fixés dans le monde à travers l’action. C’est l’action qui finalement rapporte dans l’accumulation de la force et de l’unité interne, ou dans la faiblesse et la contradiction.

La foi interne grandit dans la reconnaissance de "l’autre", d’une intention étrangère que je ne peux posséder mais que je peux aimer et rendre digne. Cette intention qui ne m’appartient pas, je peux la reconnaitre dans l’autre être humain près de moi, je peux percevoir une intention évolutive à laquelle je participe, en frôlant le terrain du sacré. Mais cette reconnaissance de "l’autre" s’évanouit immédiatement comme compréhension intellectuelle ou comme émotion touchante à moins qu’à travers l’action nous reconnaissions "l’autre" que je ne possède pas mais que l’action peut révéler.
Ainsi la valeur de l’action est tout d’abord donnée par sa capacité à augmenter la foi interne et l’unité interne et non pas par le fait d’atteindre des objectifs. Les indicateurs externes de l’action ont une importance au moment de l’évaluation et de la réflexion mais ne peuvent supplanter la référence existentielle de la croissance de la paix intérieure, de la force interne et de la joie du futur en soi même et dans le milieu qui m’entoure. En faisant cette inversion de la valeur de l’action, nous expérimentons de la contradiction, de la faiblesse et la foi s’externalise vers l’ingéniosité ou le fanatisme.
Nous en comprenons un peu plus sur la foi interne en la différenciant de la foi externe dans laquelle on croit que l’objet de foi ou la croyance est la cause de la foi. Nous avons traduit la foi interne dans sa modalité de foi en soi-même et de foi dans la transcendance.
La foi peut être réveillée quand se présente à nous la proximité de la mort ou du non-sens; ceci peut arriver par accident, ou parce que consciemment nous nous approchons aimablement de ces pensées, en acceptant l’incertitude et l’angoisse qu’elles nous produisent. La reconnaissance de ma nécessité est aussi reconnaissance de la fragilité, de l’errance dans le non-sens, du futur qui se brise avec la mort. Depuis le contact avec cette nécessité, je prends la décision de réveiller ma foi interne, de sentir ma force intérieure.
Dans cette internalisation, je trouve une force intérieure et un calme que nous appelons foi interne. Cette foi interne, je peux la diriger vers quelque chose de "voulu", d’aimé. Cet "autre" vers lequel je dirige ma foi ne peut être possédé puisqu’il n’est pas ce qu’il est mais qu’il change et se constitue dans la mesure où la foi interne grandit ; et à mesure que ma foi se dépose en lui, la sensation d’elle même s’intensifie. Le contact et la reconnaissance de cette énergie va changer les croyances que j’ai sur la vie, les autres et la transcendance.
En prenant contact avec la sensation de ma force intérieure, j’observe que celle-ci est liée à certaines personnes, à certains projets ou futurs possibles vers lesquels je me dirige. Je peux sentir aussi la force avec laquelle je m’accroche à eux et la peur que je ressens à l’idée que ces personnes m’abandonnent ou que ce futur imaginé ne s’accomplisse pas. Je peux maintenant observer cette dépendance de ma force intérieure à ces futurs possibles. En observant mon appréhension et ma peur, j’entre dans un espace plus interne et plus tranquille, et j’observe ces attachements depuis une certaine neutralité. Cette position interne peut se convertir en une nouvelle référence dont la croissance et le renforcement donnent un sens rénovateur à la vie et orientent l’action vers un destin libérateur.

2018/08/09

Préparez vous

Préparez vous chère ami e s
Préparez vous à pénétrer dans l absurdité total
Préparez vous à observer le non sens
Préparez vous à ressentir la vitalité diffuse
Préparez vous à devoir faire un choix...
Quoi qu'il en soit nous sommes tous responsable de notre devenir et celui de l humain en général.
Soyez rassuré, il n y a pas de bon ou mauvais choix lorsqu'on apprend de ses échecs
Beaucoup ne parviendra pas à voir plus loin que leur propre mort
Beaucoup vont souffrir
Cela n oblige personne à s engager à dépasser notre propre conditionnement
Ça nous rend pas moins responsable...
Alors je continue vers le non sens et cherche toujours à muter pour survivre jusqu'à devenir un mort vivant fataliste
Ou j avance pas à pas échecs après échecs dans la tentative d être de plus en plus cohérent en faisant en sort de pensée ressentir et agir dans la même direction jusqu'à aimer la réalité que je construis quotidiennement.
Je sens cette intention en moi de croissance , cette soif d apprendre et de transcendé ces peurs les plus profonde qui hante ma conscience.
Gracias à celui qui guide ma direction et éveille ma responsabilité
Gracias Silo
                                                                                                                                   Eric  Amato

2018/04/28

À propos de la "naissance de l'Esprit"

"... bien que le surgissement du corps et du double (âme ou psychisme) soit mécanique, la naissance de l’Esprit est intentionnelle. Elle est voulue et dépend du type d’actions réalisées. La première a été de naitre ; dans le premier souffle, il y a la décision de vouloir vivre.

L’être humain est surtout un être intentionnel, une direction vers le futur ouvert, c’est une intention de croissance. Le fonctionnement psychique pour être évolutif et produire le développement spirituel qui est comme une graine, a besoin "d’aliment". Il a besoin de grandir et ne peut se développer que dans une atmosphère de paix, de force et de joie que nous devons créer par nos actes.

Ce sont la souffrance et la contradiction interne qui empêchent le développement spirituel et ce sont les expériences de paix, les actes valables, les expériences avec la Force, qui configurent un "centre interne", un centre de gravité évolutif duquel il est possible d’avoir des indicateurs et qui prédispose à la vraie "naissance spirituelle", car avant, c’était une semence, une graine, une possibilité.

Chaque être humain a cette semence, cette possibilité, mais c’est par le biais d’un acte libre, d’une recherche que la nécessité interne peut se développer.

Et ceci est possible dans la situation "d’échec" puisque tant que nous sommes illusionnés, distraits par d’autres intérêts dans notre vie, le réveil spirituel n’est pas possible et attend son moment."

Eduardo Gonzalo